Le beau coiffeur noir a l'air contemplatif tout en utilisant une tablette numérique dans son salon

Perspectives nord-américaines : l’incertitude politique s’ajoute à la lassitude des entreprises et des consommateurs

Après avoir été éprouvés par des mois d’inflation élevée et une flambée inédite des coûts d’emprunt de mémoire récente, les Nord-Américains accueillent avec soulagement le ralentissement de la hausse des prix et la décision des banques centrales d’assouplir leur politique monétaire en abaissant  leurs taux.

Cette nouvelle donne ne se traduira pas par un élan immédiat de la consommation, car les entreprises et les consommateurs ont fait les frais d’une inflation galopante et des difficultés causées par les taux d’intérêt lors des cycles de resserrement des diverses banques centrales.

Malgré le début de normalisation de leurs résultats, la descente des pics du cycle de la politique monétaire se heurte à un contexte politique polarisé qui pourrait faire vaciller l’activité économique. Les faux pas sur le front des politiques commis lors des élections mexicaines et la perspective d’élections imminentes au Canada et aux États-Unis risquent de faire trébucher les économies nord-américaines.

Partout en Amérique du Nord, l’inflation est en baisse et continue de diminuer, mais non sans certains heurts en cours de route, et le ralentissement économique qui semblait s’annoncer ne s’est pas concrétisé. L’activité d’embauche marque le pas, mais la croissance des salaires reste supérieure à l’inflation, ce qui aide les consommateurs à rester à flot.

En Amérique du Nord, nous ne sommes pas insensibles aux événements qui se produisent au-delà de notre hémisphère. Les événements géopolitiques d’ailleurs se répercutent généralement sur nous. La guerre en Ukraine et le conflit entre le Hamas et Israël ont beau être très éloignés de nous, nous en ressentons tout de même les effets à travers la hausse des prix. Si ces conflits devaient s’intensifier, ils risqueraient d’aggraver l’inflation ainsi que de peser sur les salaires et le pouvoir d’achat des foyers nord-américains.

Malgré tout, la tendance internationale semble indiquer une amélioration. L’inflation mondiale est en recul par rapport aux sommets récemment atteints et plusieurs grandes banques centrales, notamment la Réserve fédérale (la Fed), la Banque du Canada et la Banque centrale européenne, ont déjà réduit leurs taux d’intérêt. Lorsque le coût d’emprunt commencera à baisser, cela permettra de soutenir graduellement la demande de biens et de services nord-américains.

Certains problèmes sont communs partout en Amérique du Nord, comme les prix du logement, qui ont explosé et rendu l’accession à la propriété hors de portée pour beaucoup de gens, et les prix des loyers grugeant les budgets des consommateurs. Aggravant la situation, les taux d’intérêt élevés ont freiné la construction de nouvelles habitations, tandis qu’une hausse de l’immigration a augmenté la demande globale et exercé une pression à la hausse sur les prix des logements. Tant que le déficit de l’offre n’aura pas été comblé, cette situation continuera à peser sur les budgets des ménages et à réduire les dépenses discrétionnaires.

Mais il y a des signes d’amélioration : tous les gouvernements nord-américains tentent de corriger la situation du logement. Au Mexique, l’Institut du Fonds national du logement pour les travailleurs fournit du financement aux ménages à faible revenu, tandis que le gouvernement états-unien tire profit de programmes fédéraux, tout en travaillant avec les municipalités. Au Canada, où le manque d’accessibilité est encore plus criant, le gouvernement fédéral a annoncé des milliards de dollars en financement pour stimuler l’offre de logements et les gouvernements provinciaux ont commencé à s’attaquer à certaines restrictions réglementaires.

Mais il y a des signes d’amélioration : tous les gouvernements nord-américains tentent de corriger la situation du logement. Au Mexique, l’Institut du Fonds national du logement pour les travailleurs fournit du financement aux ménages à faible revenu, tandis que le gouvernement états-unien tire profit de programmes fédéraux, tout en travaillant avec les municipalités. Au Canada, où le manque d’accessibilité est encore plus criant, le gouvernement fédéral a annoncé des milliards de dollars en financement pour stimuler l’offre de logements et les gouvernements provinciaux ont commencé à s’attaquer à certaines restrictions réglementaires.

Voilà la situation générale. Lorsque nous examinons les trois nations nord-américaines de plus près, des différences émergent. Toutefois, nous pouvons dire que dans l’ensemble la probabilité d’une récession est très faible.

États-Unis : toujours en tête de file malgré le climat d’incertitude

La tenue de l’économie américaine a agréablement surpris au 1S2024 alors que l’inflation a continué de reculer et l’activité est restée robuste malgré de grands titres annonciateurs d’une possible récession.

L’inflation a reflué à 3,2 % au 1S2024, alors que le produit intérieur brut (PIB) réel a progressé de 3 %, ce qui a permis aux employeurs d’engager plus de 207 000 travailleurs en un mois, soit plus de 183 000 que la moyenne mensuelle des dix années précédant la pandémie. La belle tenue de l’économie durant ce même intervalle nous a incités à réviser à la hausse nos prévisions selon lesquelles la croissance de l’économie américaine éclipsera celles des autres marchés développés.

Par ailleurs, l’activité économique a commencé à décélérer au 2S2024, tout comme le marché de l’emploi. Il y a eu 116 000 emplois créés et le chômage s’est fixé à 4,3% en juillet et en août. En revanche, la valeur de l’activité de construction et les exportations nettes ont diminué en juillet. Selon nos prévisions, nous nous attendons à ce que la cadence de cette expansion glisse à 2,1 % durant la seconde moitié de l’année. Elle laissera tout de même les États-Unis dans une classe à part parmi les économies avancées. Dans nos Perspectives économiques mondiales, nous prévoyons que le produit intérieur brut (PIB) progressera de 2,5 % en 2024 et de 1,8 % en 2025. 

Si la pression inflationniste est en baisse, ce taux est descendu à 2,5 % en août par rapport à l’année précédente, certains postes de dépenses demeurent élevés pour les consommateurs, notamment l’assurance automobile et le logement. Même si l’inflation globale se situe près de la cible de 2 % de la Fed et que le marché de l’emploi est moins dynamique, la banque centrale a abaissé son taux directeur de 50 points de base le 18 septembre. Il est probable qu’elle poursuive dans cette voie l’an prochain – quoiqu’à un rythme plus lent – puisque son taux d’inflation fondamentale (qui exclut les composantes volatiles comme les aliments et l’énergie) demeure supérieur à la fourchette cible de 1 à 3 % de la Fed.

Dans un contexte marqué par un abaissement graduel des taux par la Fed et des consommateurs ayant trop recouru au crédit, il faudra un bon moment avant que l’économie américaine ne ressente les effets de la réduction des taux. Les consommateurs fortement endettés ne seront pas enclins à dépenser sans compter, mais ils s’emploieront plutôt à assainir leurs finances après avoir puisé pendant deux ans dans leurs économies.

Le logement reste un autre point sensible pour les consommateurs, les coûts d’emprunt et les prix toujours élevés se reflétant dans la réticence des consommateurs à acheter à court terme. Lorsque les taux d’intérêt commenceront à baisser l’année prochaine, la demande comprimée sera libérée et tant la construction que l’achat d’habitations devraient commencer à augmenter. En retour, cela permettra de soutenir d’autres dépenses liées au logement.

Du côté des affaires, les sondages indiquent que les conditions de financement sont généralement positives pour les entreprises. Les dépenses des entreprises devraient rester stables l’an prochain grâce aux mesures incitatives mises à la disposition des entreprises par l’entremise de législations récentes, qui devraient soutenir l’investissement des entreprises dans leurs immobilisations vieillissantes et les aider à agrandir leurs usines ou en construire de nouvelles.

Même si les perspectives sont généralement positives pour l’économie américaine, l’issue de l’élection du 5 novembre et la manière dont elle infléchira les politiques restent incertaines, ce qui soulève des inquiétudes chez les entreprises. La politique commerciale est devenue un enjeu majeur de cette élection, ce qui fait grimper l’indice d’incertitude liée aux politiques à son niveau le plus élevé depuis 2021. Cet indice est loin du score atteint lords de la présidence de Donald Trump, mais ce léger mouvement à la hausse met en lumière le malaise qui gagne les chefs d’entreprise et les répercussions possibles sur leurs décisions d'affaires.

Canada : un optimisme prudent

L’économie canadienne a peiné à gagner du dynamisme l’an dernier. Le PIB réel a chuté à 1,2 % en 2023 et a plombé la première moitié d’année où la croissance a été d’à peine 0,7 %. Le flot continu d’avertissements au sujet d’une récession imminente a fait craindre à beaucoup que l’économie touche le fond et tout particulièrement les consommateurs lourdement endettés. Les taux d’intérêt élevés n’ont pas aidé; depuis que ceux-ci ont commencé à augmenter au printemps 2022, les achats de propriété ont chuté tandis que les coûts des loyers ont explosé. Les foyers ont moins de jeu pour les dépenses discrétionnaires et les gros achats, ce qui a entraîné une baisse considérable de la demande intérieure de biens et de services.

Il y a cependant une bonne nouvelle : les taux d’intérêt, relevés en réaction à la flambée de l’inflation, se situent enfin dans la fourchette cible de la Banque du Canada. L’inflation a grimpé de 2 % en août en glissement annuel, ce qui correspond à la cible souhaitée par banque centrale. Même si l’inflation pourrait causer certaines turbulences, la Banque du Canada s’attache désormais à réduire les coûts d’emprunt pour stimuler l’économie et diminuer le chômage. D’ici la fin de l’année, on s’attend à ce qu’elle poursuive son cycle de réduction dans l’espoir de raffermir la demande et la croissance de l’emploi.

Freight train chugs alongside Bow River in Canadian Rockies


Si les ménages ont des revenus décents, la plupart d’entre eux se concentrent à payer leurs intérêts alors que les mieux nantis continuent de se constituer une réserve d’épargne. À vrai dire, 60 % des ménages ayant les revenus les plus modestes ont toujours du mal à épargner. Les soldes de carte de crédit atteignent des sommets, ce qui oblige les emprunteurs à demander des arrangements en matière de crédit, ce qui risque de limiter l’accès au crédit par la suite. Cette situation est aggravée par le repli du marché de l’emploi, le chômage ayant bondi à 6,6 % en août alors que le bassin de travailleurs a atteint un niveau que l’économie est incapable d’absorber.

La population du Canada a accueilli depuis 2021 près de trois millions de personnes, divisées de manière presque égale entre résidents permanents et non permanents. Le rythme de la croissance étant insuffisant pour créer assez d’emplois pour répondre à l’augmentation du bassin de travailleurs, le taux de chômage devrait sans doute augmenter encore d’ici la fin de l’année.

Pour ce qui est des entreprises, les perspectives à court terme ne sont pas très positives pour l’investissement en capital en raison de la morosité des responsables des achats. Toutefois, les tensions sur les coûts se modèrent et les conditions financières s’améliorent. Le sondage de l’Indice de confiance commerciale (ICC) mené en juin par EDC révèle que les exportateurs constatent une amélioration des conditions économiques mondiales et des débouchés commerciaux. Ce contexte pourrait conduire à un regain de l’investissement des entreprises l’an prochain.

L’industrie automobile freine l’élan des exportations canadiennes depuis le début de l’année, car les constructeurs réaménagent leurs installations pour la production de véhicules électriques. Ce ralentissement devrait néanmoins s’estomper l’an prochain. À la faveur de l’excellente récolte de cette année, la filière alimentaire devrait soutenir l’impulsion des exportations canadiennes durant la première moitié de 2025.

De plus, bien qu’elles aient été essentielles dans le soutien à l’économie depuis la pandémie, les dépenses gouvernementales ont ralenti alors que les institutions publiques s’emploient à rééquilibrer les budgets. Cette décision entravera sans doute l’élan de la croissance économique, qui a été décevant en 2023, et qui devrait progresser de tout juste 1,1 % en 2024 et de 1,6 % en 2025.  

Dans l’intervalle, la timide croissance de l’économie canadienne détournera les investisseurs vers le marché américain. Ce faisant, le huard devrait sans doute s’échanger en moyenne face au billet vert à 73 cents cette année, une performance qui s’inscrit dans la tendance à la baisse des deux dernières années. Toutefois, le huard devrait reprendre un peu d’altitude pour s’établir à 74 cents en 2025 grâce à de meilleures perspectives économiques et le rattrapage de la Fed sur le front de la réduction des taux. 

Mexique : une croissance stable, mais pas fulgurante, à l’horizon

Les effets du scrutin du 2 juin au Mexique se répercutent sur toute l’économie du pays en raison de la réaction défavorable des marchés des capitaux au résultat des  élections. Les marchés des actions ont dégringolé de plus de 4 200 points et le peso a perdu 18 % de sa valeur face au billet vert entre le 31 mai et le 10 septembre. L’écrasante victoire de la première présidente du pays Claudia Sheinbaum et l’obtention d’une majorité qualifiée par sa coalition au nouveau Congrès ont permis d’adopter un projet de loi controversé au sujet des pouvoirs judiciaires qui a été promulgué avant même son investiture du 1er octobre. La perception selon laquelle cette législation entraînera une dégradation de la gouvernance et de la règle de droit, deux éléments essentiels pour attirer l’investissement étranger, ont déstabilisé les investisseurs.

Les marchés des capitaux ne se sont pas encore complètement remis de la réaction négative à l’élection et de la réforme judiciaire qui a suivi, et les investisseurs sont dans l’expectative afin d’évaluer l’orientation des politiques de la nouvelle administration. L’investissement direct étranger (IDE) dans les nouveaux projets suit une tendance baissière depuis que le président sortant Andrés Manuel López Obrador a laissé entendre la possibilité de changements constitutionnels en 2022, et l’IDE a glissé à un creux au deuxième trimestre de 2024 lorsqu’il est devenu évident que la réforme constitutionnelle pourrait devenir réalité.

La nouvelle loi touchant le système judiciaire pourrait faire capoter l’investissement au pays. L’annonce faite par Tesla en juillet selon laquelle  le constructeur mettrait entre parenthèses le projet de construction d’une usine de 5 USD à Santa Catarina dans l’État du Nuevo León a fait ressortir les conséquences de la réforme constitutionnelle sur le potentiel économique du Mexique.   

L'économie a affiché une piètre performance durant la première moitié d’année. Les dépenses engagées par le gouvernement avant l’élection n’ont pas suffi à dynamiser l’économie, et l’activité a pratiquement stagné au 1S2024. La robustesse du peso a bridé les exportations alors que l’inflation a étouffé la consommation privée. Après avoir inscrit une croissance à deux chiffres de 2021 à 2023, l’investissement privé devrait faire une pause en attendant les orientations du nouveau gouvernement. Ce contexte se traduira par une création d’emploi moins importante et une inflation plus vive qu’à la normale, ce qui mettra à mal la consommation privée l’an prochain.  

Sur le plan de l’inflation, les autorités monétaires font de lents progrès et doivent surmonter plusieurs embûches si bien que l’avancée de la Banque du Mexique (Banxico) vers sa cible de l’inflation pourrait être jugée décevante. Banxico révise avec prudence son taux directeur, car l’inflation demeure une menace. Banxico a abaissé son taux directeur à deux reprises cette année, chaque fois de 25 points de base, et elle devrait maintenir le cap au 1S2025 pour éviter toute nouvelle envolée de l’inflation.

L’activité étant peu florissante sur le marché intérieur, le Mexique peut compter sur la robuste demande américaine pour étayer son activité économique. Le Mexique a ravi à la Chine le titre de premier exportateur de marchandises vers les États-Unis, alors que les tensions géopolitiques sino-américaines réorientent  les acheteurs américains qui souhaitent réduire les risques pour leurs chaînes d’approvisionnement auprès de la Chine et se tournent vers le Mexique pour exécuter leurs commandes. 

Le peso se déprécie depuis les élections de juin, ce qui rend les exportations mexicaines meilleur marché pour les acheteurs américains. La devise mexicaine devrait continuer de se déprécier l’an prochain pour avoisiner les 18 à 19,50 pesos mexicains face au billet vert. Il y a fort à parier que les investisseurs seront prudents relativement à leurs activités dans l’économie mexicaine jusqu’à ce que l’administration de la présidente Sheinbaum montre qu’elle est favorable aux entreprises.

Les Services économiques d’EDC ont révisé à la baisse les perspectives du Mexique à moyen terme en raison de la performance décevante du premier semestre, alors que l’incertitude plane sur l’administration de Claudia Sheinbaum. Nous prévoyons que le PIB réel progressera de 1 % en 2024 et de 1,4 % l’an prochain. Il s’agit respectivement d’une réduction de 0,9 et 0,6 point de pourcentage pour 2024 et 2025 par rapport à nos prévisions de l’été 2024.

Comment EDC peut aider votre entreprise

Exportation et développement Canada (EDC) propose plusieurs solutions, notamment la connaissance des marchés et le jumelage d’affaires, pour soutenir les entreprises canadiennes dans leur expansion mondiale. Nos équipes sectorielles disposent d’un large éventail de connaissances et d’expertise.

« Nous avons une connaissance locale de la manière de faire des affaires dans différents marchés, mais aussi les bonnes personnes qui disposent des bons contacts et nous pouvons tirer parti de ces avantages pour les exportateurs canadiens », explique Jorge Rave d’EDC, vice-président régional, Amérique latine et Antilles.

« Nous disposons d’une Équipe Canada solide et importante, incluant le Service des délégués commerciaux, de même que nos guides sur la culture locale et sur la façon de faire des affaires en tant qu’exportateur canadien. »

  • Pour accéder au marché des États-Unis, il faut commencer par apprendre à tirer parti de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), puis à comprendre comment la politique états-unienne Buy America (« Achetez américain ») peut avoir une incidence sur le commerce.
  • Le Centre aide-export d’EDC couvre le monde entier et peut vous mettre en contact avec des conseillers en commerce d’EDC qui pourront répondre à vos questions, vous aider à comprendre vos défis et vous aider à leur trouver des solutions. Ils se spécialisent dans les marchés, les stratégies et les exigences en matière de douanes et de réglementations.
  • EDC offre aussi le Programme de jumelage d’affaires d’EDC, qui fait la promotion des capacités d’exportation canadienne auprès d’acheteurs internationaux.

Pour les exportateurs canadiens qui ont besoin d’atténuer les risques, EDC propose des solutions et des outils de financement et de gestion des risques.
 

     

   

                                               

Date de modification : 2024-07-29