
La nouvelle administration américaine a pris ses quartiers après avoir assuré, à grand renfort de promesses, qu’elle remodèlerait les relations économiques et commerciales à l’échelle mondiale en donnant la priorité aux intérêts des États-Unis. La déferlante de nouveaux droits de douane et de mesures commerciales – par la suite été annoncés, modifiés ou mis en suspens – a engendré une forte houle et d’incessants remous pour les marchés mondiaux, les entreprises et les partenaires commerciaux de l'Amérique. Les perspectives pour les politiques demeurant incertaines, les exportateurs se préparent à de possibles turbulences.
Répercussions des tarifs américains sur le commerce mondial
Les Services économiques d’EDC ont tenu compte du regain d’incertitude dans leur édition du printemps des Perspectives économiques mondiales. Notre scénario de référence prend en considération les droits de douane annoncés de 25 % sur les importations mondiales d’acier et d’aluminium aux États-Unis, les droits de douane de 25 % sur les importations en provenance du Mexique, les droits de douane cumulés de 20 % supplémentaires à l’encontre de la Chine et les droits de douane de 25 % sur les importations canadiennes (les produits énergétiques étant soumis à des droits de douane de 10 %). Les tarifs douaniers de rétorsion de la Chine et du Canada sont également pris en compte, en partant de l’hypothèse que les tarifs douaniers imposés au Canada et au Mexique demeureront en vigueur jusqu’à la fin 2026. Nos prévisions se fondent sur l’évolution des politiques avant le 7 mars dernier.
Compte tenu de ces facteurs déterminants, les Services économiques d’EDC s’attendent à ce que l’économie mondiale enregistre une croissance de 2,6 % en 2025 et de 3 % en 2026. L’économie américaine bénéficie d’une conjoncture économique favorable sur le marché intérieur, et notamment d’un marché de l’emploi stable. Cependant, des données récentes donnent à penser que les dépenses de consommation marquent le pas et que la confiance vacille, plombée par l’imprévisibilité des politiques économiques. De fait, les entreprises sont de plus en plus préoccupées par les changements tarifaires et l’abrogation possible des politiques industrielles ayant soutenu les plans d’investissement. L’augmentation de la volatilité et les répercussions des tarifs douaniers limiteront la croissance économique américaine à 1,7 % en 2025 et à 1,9 % en 2026.
La Réserve fédérale américaine privilégiera une approche plus modérée que ses homologues du fait de la position unique de l'économie américaine et de l’incidence des politiques proposées sur l’inflation. Dans ce contexte, nous prévoyons un léger freinage de l’économie américaine avec une seule baisse de taux prévue, suivie de quatre réductions en 2026.
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Les perspectives de l’économie canadienne à l’ère de l’incertitude commerciale
L’élan de l’économie canadienne au début 2025 a été plus robuste qu’anticipé, mais le moral des consommateurs a flanché depuis l’entrée en fonction de la nouvelle administration américaine. Les entreprises peinent à investir dans un contexte d’incertitude commerciale. Or, cette imprévisibilité chamboule leurs plans d’investissement. L’embellie des exportations en début d’année – qui s’explique par la volonté des acteurs commerciaux d’éluder l’impact de futurs droits de douane – stimulera la croissance de l’économie canadienne. Toutefois, les contrecoups de ces droits neutraliseront cette impulsion initiale tout au long de l’année. Nous escomptons une croissance de l’économie canadienne de 0,8 % en 2025 et de 1 % en 2026.
La Banque du Canada a considérablement diminué ses taux d’intérêt. Au pays, le taux directeur a été abaissé de 2,25 points de pourcentage entre le milieu de 2024 et mars 2025. Selon nous, la banque centrale procédera à trois nouvelles baisses de taux cette année afin de soutenir l’activité économique, laquelle risque d’être mise à mal par les droits de douane et la montée des prix.
Le dollar canadien sera soumis à des tensions croissantes en raison des perspectives divergentes accolées aux taux d’intérêt au Canada et aux États-Unis, mais aussi du retentissement de l’imposition de droits de douane. Par rapport au billet vert, nous prévoyons que le huard se négociera en moyenne à 66 cents en 2025, malmené par une forte volatilité, puis remontera à 68 cents l’an prochain.
En Europe, les perspectives seront assombries par l'incertitude persistante et les vents contraires soufflant sur l’économie mondiale. Plus concrètement, l’Allemagne et la France auront du mal à générer une croissance substantielle. Dans l’Hexagone, le désordre politique entravera les réformes destinées à embellir les perspectives pour le budget et la croissance. Nous tablons sur une croissance de l’économie française de 0,8 % en 2025 et de 1,4 % en 2026. De son côté, l’Allemagne poursuivra sa transition vers un modèle de croissance durable pour son secteur industriel, qui a fait une croix sur l’énergie bon marché en provenance de la Russie. Nous nous attendons à ce que la croissance s’établisse à 0,4 % en 2025 et à 1,2 % en 2026. La mise en place d’un plan de relance historique dans les domaines de la défense et des infrastructures viendrait éclaircir les perspectives.
La Chine est confrontée à des perspectives économiques difficiles dans la foulée de la majoration de 20 % des droits de douane. Ces droits s’ajoutent à ceux précédemment imposés par l’administration Biden et la première administration Trump. Malgré tout, l’économie intérieure de la Chine se redresse après les déconvenues de son marché immobilier et leurs effets déflationnistes. Nous prévoyons que la Chine dégagera une croissance de 4,7 % en 2025 et de 4,1 % en 2026.
La morosité économique à l’échelle du globe en 2025 jouera sur la demande et le cours des principaux produits de base. Aussi, d’après nous, le cours du pétrole selon l’indice West Texas Intermediate oscillera en moyenne autour de 67 dollars américains, sous l’effet d’une demande en berne et d’une capacité excédentaire.
Conclusion : il faudra naviguer entre les écueils économiques
Naviguer dans des eaux agitées présente un défi indéniable. Dans leur rapport des Perspectives économiques mondiales, les Services économiques entrevoient quelques années mouvementées. Les marchés, les entreprises et les partenaires commerciaux doivent renforcer leur détermination, se montrer résilients et être prêts à changer de cap pour s'adapter à des conditions périlleuses.
Nous tenons à remercier chaleureusement Ross Prusakowski, directeur de l’Équipe des renseignements sur les secteurs et les pays d’EDC, pour sa contribution à la présente chronique. N’oubliez pas que votre avis est très important pour les Services économiques d’EDC.
Si vous avez des idées de sujets à nous proposer, n’hésitez pas à nous les communiquer à l’adresse economics@edc.ca et nous ferons de notre mieux pour les traiter dans une édition future.