Les obstacles au commerce rencontrés sur un nouveau marché d’exportation peuvent donner du fil à retordre, mais ils ne sont pas insurmontables.
Outre les évidentes barrières tarifaires – les droits imposés sur les marchandises –, il existe une foule de barrières non tarifaires qui sont autant d’obstacles à l’exportation. Les contingents et la concession de licence pour un produit, le dédouanement, les normes de certification et les taxes à l’importation, sans oublier la langue et la culture, en sont tous des exemples.
Ces obstacles entravent les échanges commerciaux, mais les accords de libre-échange (ALE) permettent d’en éliminer la plupart tout en créant de nouveaux débouchés. Bien que la suppression des droits de douane soit leur objectif premier, ces accords peuvent aussi régir d’autres aspects des échanges, notamment les contingents, les normes applicables aux produits, la main-d’œuvre et la propriété intellectuelle.
Le Canada a conclu 11 ALE avec 15 pays, par exemple avec les membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE), dont font partie l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse. Cet accord porte uniquement sur les marchandises et vise avant tout à éliminer les tarifs douaniers.
La bonne nouvelle pour les exportateurs canadiens est que l’Accord économique et commercial global Canada-Union européenne (AECG) entrera en vigueur provisoirement en septembre, leur donnant alors accès à un marché de plus de 500 millions de consommateurs européens.
Dès l’entrée en vigueur provisoire de l’AECG, environ 98 % des barrières tarifaires seront abolies sur 28 marchés de l’UE, y compris au Royaume-Uni jusqu’à sa sortie officielle de l’UE d’ici mars 2019. De plus, l’AELE viendra réduire les barrières tarifaires dans quatre pays de l’OCDE.
Malgré l’AECG et l’AELE, les entreprises canadiennes qui cherchent à acquérir de nouveaux clients en Europe devront affronter une forme ou une autre d’obstacle au commerce.
« Tous les marchés comportent des écueils », indique Mark Warner, un avocat spécialisé en droit commercial international ayant déjà pratiqué à Bruxelles. « C’est pourquoi vous devez avant tout bien vous préparer – cette première étape est essentielle. »
Avant de se lancer sur un marché en particulier, une entreprise doit notamment déterminer s’il s’agit d’un choix logique sur le plan économique.
« Le plus gros défi pour les PME d’ici est de comprendre la dynamique et l’acheteur cible d’un marché donné, ajoute Warner. C’est là le plus important obstacle au commerce, selon moi. »
Les entreprises canadiennes n’ont généralement pas de liens solides avec les chaînes d’approvisionnement européennes. Souvent, il s’agit de PME qui commencent à exporter et partent de zéro.
Les options sont nombreuses pour les entreprises qui veulent s’implanter sur un nouveau marché. La plus simple est de passer par Internet, mais il est encore mieux d’avoir une présence physique en nouant un partenariat avec une entreprise locale, que ce soit en formant une coentreprise ou en créant une société affiliée.
Cette stratégie permet de contourner maints obstacles au commerce. Toutefois, bien qu’une entreprise étrangère doit satisfaire à des exigences de plus en plus semblables à celles visant une entreprise locale, certaines règles persistantes lui imposent un plus lourd fardeau.
Le contournement des obstacles au commerce n’est qu’un des nombreux avantages d’exploiter une entreprise sur place.
Selon le marché, en voici quelques autres :
- Augmentation des ventes et de la part de marché
- Capacité à mieux servir les clients locaux
- Facilité d’accès aux chaînes d’approvisionnement et aux réseaux régionaux
- Réduction des coûts de main-d’œuvre et des frais d’exploitation
- Atténuation ou élimination des obstacles légaux et réglementaires
- Meilleur accès aux technologies
« Il existe une foule de moyens de percer un nouveau marché; vous devez trouver celui qui convient le mieux à votre entreprise, explique Warner. Il n’y a pas de solution unique. »
Si établir une présence locale n’est pas une option, il y a d’autres solutions, comme développer une relation avec un distributeur ou faire appel à l’expertise d’un courtier en douane.
Lorsque le processus de dédouanement est lent et complexe, recourir à un distributeur peut aider à atténuer les effets de cet obstacle au commerce. Le distributeur achète les produits de l’entreprise pour les revendre à ses propres clients. Il se charge de toutes les formalités entourant l’importation des produits, comme le dédouanement et le paiement des droits et des taxes. Il peut aussi s’occuper de la logistique sur place, ce qui peut être un atout majeur si le processus de dédouanement cause souvent des retards.
Le choix d’un agent à l’étranger est l’une des plus importantes décisions que doit prendre une entreprise qui prépare son entrée sur un nouveau marché. La société québécoise Morgan Schaffer, par exemple, traite régulièrement avec plus de 150 agents internationaux. Elle en trouve beaucoup lors de salons commerciaux, sur la recommandation de clients, d’autres agents ou de partenaires du secteur, et même chez ses concurrents.
Un bon agent international sera capable de suggérer des options de financement et de transport sur le terrain, de dédouaner des marchandises, de se charger du recouvrement et de vous aider à comprendre les lois et les coutumes locales.
Il doit être intègre, posséder de bonnes connaissances techniques, employer des ingénieurs et connaître le secteur; il doit être prêt à investir temps et argent, pendant au moins deux ans, avant de toucher le moindre profit, selon Serge Gutieres, directeur des ventes et du marketing à Morgan Schaffer.
« Il nous faut au moins de 24 à 30 mois pour former un nouvel agent, lui permettre de pénétrer son marché et commencer à générer réellement des ventes. Dans certaines régions, cela peut prendre près de quatre ans », indique-t-il.
La langue et la culture sont parmi les plus grandes barrières à l’entrée sur un nouveau marché.
« Il est toujours difficile de faire affaire avec des entrepreneurs de plusieurs pays aux cultures différentes. La clé, c’est de communiquer. Les obstacles langagiers et les pratiques commerciales variées sont les deux principaux défis. Pour les surmonter, vous devez rencontrer régulièrement vos agents en personne afin de bâtir une relation et un lien de confiance, comprendre vous aussi le marché et les clients, et adapter vos stratégies de vente », conseille Gutieres.
Selon une étude récente de la Société internationale Livingston, de Toronto, le nombre d’entreprises qui utiliseront deux accords commerciaux ou plus au cours des 12 à 24 prochains mois devrait augmenter de 63 %. Sans surprise, c’est dans l’UE que les échanges connaîtront la croissance la plus marquée.
L’AECG permettra la suppression d’environ 98 % des barrières tarifaires dès son entrée en vigueur provisoire, donnant ainsi accès à un marché de plus de 500 millions de consommateurs. Mais l’accord ne sert pas seulement à mettre un terme aux tarifs douaniers; il prévoit aussi la reconnaissance mutuelle des normes par la création d’un cadre de coopération réglementaire.
« La certification et la mise à l’essai des produits sont les grandes victoires de cette entente », affirme Audrey Ross, spécialiste de la logistique et des douanes à Orchard International, à Toronto. « Grâce à l’implantation de centres de processus et de tests au Canada, les entreprises qui souhaitent exporter leurs produits vers le marché hautement réglementé qu’est l’UE économiseront temps et argent. À l’avenir, les normes seront révisées et fixées de façon conjointe. »
Comment les entreprises canadiennes peuvent-elles vaincre les autres obstacles au commerce dans l’UE?
Bien que profitable, l’AECG ne dit rien sur les taxes locales qui, en Europe, sont beaucoup plus élevées que ce à quoi les Canadiens sont habitués, ajoute Ross.
Outre les possibles coûts de livraison additionnels, les marchandises vendues à l’étranger peuvent être assujetties à une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou à une taxe de vente locale. Il est donc extrêmement important de comprendre les règles de taxation du pays importateur afin de s’y conformer.
« Il y a quelques années, Orchard avait reçu quelques petites commandes de clients européens. Nous nous sommes rendu compte que pour développer notre entreprise, nous avions besoin de nous renseigner davantage. Nous avons pris contact avec un cabinet fiscal mondial qui nous a fortement recommandé de nous implanter aux Pays-Bas. Nous avons demandé un numéro de TVA auprès du fisc néerlandais et avons trouvé un représentant fiscal, raconte Ross. Le cabinet nous a aussi recommandé un expéditeur néerlandais. Donc, nous importons nos marchandises aux Pays-Bas, les dédouanons, appliquons une TVA en passant par un représentant fiscal et les expédions ensuite à nos clients en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et en Italie. Nous déclarons les taxes perçues tous les mois, trimestres et années au fisc néerlandais avec l’aide de notre fiscaliste-conseil. Les services d’un conseiller sont coûteux, mais moins que la TVA (qui varie de 17 à 22 % selon l’État membre). Maintenant, nous jouissons de presque tous les avantages d’un importateur local. »
Le point sur l’AECG
L’AECG fera naître de nouvelles occasions pour les entreprises d’ici, mais encore faudra-t-il les saisir, souligne Warner.
« On parle beaucoup de cet énorme potentiel, poursuit-il. Tout cela est bien beau, mais la grande question est : les entreprises seront-elles moins frileuses et iront-elles vraiment vers de nouveaux marchés? »
C’est aussi l’avis de l’expert en commerce international Jayson Myers.
« Ce qui doit nous préoccuper, plus que les obstacles au commerce, c’est la possibilité que les entreprises canadiennes ne soient pas prêtes à tirer profit des nouvelles occasions fournies par l’AECG, dit-il. L’UE est un marché très sophistiqué. On peut se demander si nos entreprises ont les technologies qu’il faut et pourront satisfaire aux normes. »
D’après Warner, les PME, en particulier, doivent savoir que vendre dans l’UE n’a rien à voir avec vendre au Canada.
« C’est un tout autre monde. Ce qui se vend en Amérique du Nord ne va pas nécessairement se vendre dans l’UE, explique-t-il. La difficulté qui guette les PME est qu’elles devront dépenser pour réellement saisir ce marché. »
Et pour commencer, il faut examiner la demande, ajoute Myers.
« Il faut s’assurer d’attirer des clients qui sont à la recherche de choses qui sortent de l’ordinaire, au lieu de penser qu’il s’agit seulement de commercialiser un produit sur un marché différent. La majorité des entreprises constatent qu’elles doivent personnaliser leurs produits et services pour offrir de la valeur à une nouvelle clientèle. C’est ça, exporter à l’ère du nouveau millénaire. »
Élimination des obstacles au commerce :
Les barrières tarifaires et non tarifaires entravent les échanges commerciaux, mais les accords de libre-échange (ALE) permettent d’en éliminer la plupart tout en créant de nouveaux débouchés. Bien que la suppression des droits de douane soit leur objectif premier, ces accords peuvent aussi régir d’autres aspects des échanges, notamment les contingents, les normes applicables aux produits, la main-d’œuvre et la propriété intellectuelle.
Dès son entrée en vigueur provisoire, l’AECG diminuera les obstacles au commerce ayant trait à la certification, soit l’une des plus grandes barrières non tarifaires présentes dans les pays de l’UE.
En effet, l’AECG permettra aux producteurs canadiens de faire tester et certifier ici même certains de leurs produits destinés aux marchés de l’UE, réduisant ainsi non seulement les coûts liés à ces processus, mais aussi les retards pour les fabricants.
Allègement des procédures administratives :
Lorsque c’est possible, les procédures de douane seront simples, efficaces, claires et prévisibles, l’objectif étant d’accélérer le traitement des marchandises aux frontières et de rendre leur transport plus économique, plus rapide et plus efficient.
Obstacles au commerce dans l’UE :
Les ALE permettent d’éliminer des obstacles au commerce et de créer de nouveaux débouchés. Bien que la suppression des droits de douane soit leur objectif premier, ces accords peuvent aussi régir d’autres aspects des échanges, notamment les contingents, les normes applicables aux produits, la main-d’œuvre et la propriété intellectuelle.