Les Néo-Canadiens qui deviennent entrepreneurs sont plus susceptibles d’intégrer l’exportation à leur modèle d’affaires, et quand ils le font, ils visent souvent d’autres pays que les États-Unis.
Pourquoi? Danielle Goldfarb, du Centre du commerce mondial du Conference Board du Canada, leur prête des avantages naturels par rapport aux non-immigrants.
« Les Canadiens d’origine peuvent trouver les marchés étrangers complexes en raison des barrières linguistiques et culturelles. Pour les immigrants, au contraire, cela n’a rien de problématique : ils ont des relations et ils parlent la langue, précise-t-elle. Les Canadiens de deuxième génération gardent aussi des liens culturels, mais reste que les immigrants possèdent souvent des avantages naturels en matière de commerce : ils comprennent la réalité de vivre et de travailler ailleurs et connaissent différentes cultures commerciales, en plus de compter sur un réseau. »
Le rapport Selling Beyond the U.S.: Do Recent Immigrants Advance Canada’s Export Agenda? du Conference Board du Canada, signé par Horatio Morgan et Sui Sui de l’Université Ryerson, abonde dans le même sens. Les auteurs y comparent les expériences d’exportation d’entreprises de nouveaux immigrants – soit ceux vivant au Canada depuis au plus cinq ans – et d’entreprises de non-immigrants. Pour ce faire, ils ont examiné des données sur 15 000 PME.
Conclusion : 12 % des entreprises d’immigrants exportent des biens et services ailleurs qu’aux États-Unis, contre 7 % pour les entreprises de non-immigrants. En outre, malgré un chiffre d’affaires moins élevé, les entreprises d’immigrants figurent parmi les PME les plus florissantes.
« L’étude se limitait au Canada, et nous avons comparé les entreprises d’immigrants à celles de non-immigrants, souligne Mme Goldfarb. Nous avons résumé le tout et constaté que les exportations comptent pour une plus grande part des ventes chez les entreprises d’immigrants que chez les entreprises de non-immigrants. »
Syed Ali, fondateur de Riz Global Foods, entreprise exportatrice de produits alimentaires comme le bœuf, les œufs et le poulet, en plus de desserts préparés, affirme que les résultats de l’étude concordent avec son expérience.
« À la base, on vient d’un autre pays, et on le connaît mieux que le Canada », explique M. Ali, originaire de l’Inde. « J’ai terminé mon MBA, puis je me suis installé au Proche-Orient. J’y suis resté de 1995 à 2007. Je comprenais la culture d’affaires, et j’avais appris les rudiments de l’arabe. Après, j’entrais dans l’inconnu au Canada. Dès mon arrivée, je me suis demandé ce que je pourrais bien exporter de l’autre côté de l’océan. »
Mme Goldfarb attribue aussi la réussite des immigrants sur les marchés étrangers à leur profil de personnalité.
« Je pense que tout repose sur les traits propres aux immigrants, dit-elle. Ils quittent leur patrie et, pour une raison ou une autre, s’installent dans un nouvel endroit, alors ils sont probablement plus enclins à prendre des risques et moins intimidés par l’idée d’exporter. »
Elle indique que l’étude sur le commerce examinait les principaux facteurs de succès sur les marchés étrangers, dont l’expérience internationale.
« Le leadership doublé d’une expérience internationale, qu’on soit immigrant ou non, joue un rôle déterminant dans le succès d’une entreprise sur les marchés étrangers. Disons que vous êtes né au Canada et que vous n’avez jamais voyagé. Si vous embauchez un nouvel immigrant ou quelqu’un ayant de l’expérience internationale, vous pouvez tirer profit de ce bagage et ainsi augmenter vos chances de succès, toutes choses étant égales par ailleurs, évidemment. »
Au chapitre des relations d’affaires et de l’accès au financement, le rapport montre que les immigrants exportateurs ont un réseau relativement peu développé au pays. S’ils parviennent généralement à obtenir des fonds au moyen des mécanismes formels, par exemple auprès d’organisations comme Exportation et développement Canada, ils ont du mal à accéder au financement informel, comme le capital-risque.
« Ils ont généralement de bons taux d’approbation pour les prêts bancaires, mais on voit un certain écart avec les exportateurs de produits du savoir, puisqu’ils n’ont pas, par exemple, d’usine à donner en garantie quand ils ont recours à des mécanismes formels. Voilà donc un groupe d’exportateurs que nous devrions soutenir et encourager. »