Une enquête menée récemment par EDC révèle que les entreprises canadiennes adoptent de nouvelles stratégies d’affaires pour se parer aux possibles répercussions de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Le sondage sur l’Indice de confiance commerciale, réalisé deux fois par an, sert à prendre le pouls d’environ mille entreprises dans le but de connaître leurs attentes quant à l’avenir, ainsi que leur opinion sur des sujets clés tels que la renégociation de l’ALENA. Il fournit des données normalement difficiles à obtenir avec les statistiques commerciales traditionnelles.
Notre plus récente enquête, menée en octobre dernier, a permis de constater que malgré la forte incertitude concernant la politique commerciale et les faibles résultats d’exportations ces derniers temps, l’Indice de confiance commerciale publié par EDC s’est étonnamment bien maintenu. Il n’a que légèrement diminué par rapport à celui du printemps 2017. La plupart des entreprises ont mentionné qu’elles s’attendaient à ce que les conditions se maintiennent ou qu’elles s’améliorent dans une période de six mois.
Nonobstant ce portrait généralement optimiste, environ un quart des répondants ont confié que les discussions sur l’ALENA avaient eu un effet négatif sur leurs activités à l’échelle nationale, et qu’elles revoyaient leurs stratégies pour se parer à toutes éventualités..
Depuis le début des discussions sur l’ALENA au mois d’août, des progrès ont été observés concernant certaines questions comme l’entente sur les dispositions visant les petites et les moyennes entreprises, la facilitation douanière et des échanges commerciaux et le commerce électronique. Néanmoins, les parties prenantes demeurent partagées sur les enjeux cruciaux mis de l’avant par les États‑Unis pour justifier la renégociation de l’ALENA, notamment le règlement des différends, la clause de temporisation et les règles d’origine applicables aux produits automobiles. Le représentant des États-Unis pour le commerce, Robert Lighthizer, a affirmé dans un récent communiqué qu’il demeurait « préoccupé par le manque de progrès ».
À l’approche de la sixième ronde de discussions prévue le 23 janvier au Canada et de délais ambitieux pour la conclusion des négociations, à quel point les entreprises canadiennes sont-elles préoccupées quant à leurs perspectives d’exportations internationales en 2018, et comment gèrent-elles l’incertitude croissante?
L’enquête montre que les entreprises envisagent trois stratégies :
- Transférer une partie de leurs activités aux États-Unis.
- Diversifier leurs exportations hors États-Unis.
- Attendre et observer avant d’agir.
Environ 6 % des entreprises sondées envisagent de transférer une partie de leurs activités aux États-Unis pour échapper aux perturbations frontalières. Elles demeurent pour l’instant au stade des discussions, mais il ne fait nul doute que plusieurs de ces entreprises préparent des plans visant à se parer à toutes éventualités et que le sujet refait constamment surface dans leurs échanges avec EDC. À l’heure actuelle, seules quelques entreprises ont restructuré leurs activités, mais on pourrait s’attendre à observer ce type de mesure de plus en plus souvent si la situation frontalière entre le Canada et les États-Unis venait à empirer.
Il est encourageant de constater que certaines sociétés canadiennes ont adopté une approche proactive et ambitieuse afin d’orienter leurs exportations et leurs investissements hors des États-Unis. Pour ces dernières, le nouvel Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne entré en vigueur de façon provisoire en septembre 2017, ainsi que le dynamisme de l’économie européenne, arrivent juste à point.
Les questions de l’enquête concernant l’AECG révèlent que les Canadiens visent les marchés importants de l’Allemagne et de la France, et dans une moindre mesure, ceux du Royaume‑Uni, de l’Italie et de l’Espagne. Certaines entreprises sont en phase de concevoir et d’adapter de nouveaux produits et services destinés spécifiquement aux marchés européens, et d’autres entendent tirer profit des intrants moins coûteux occasionnés par la réduction des tarifs douaniers.
Finalement, il existe une troisième catégorie d’entreprises canadiennes dont l’approche est plus prudente. Ces dernières comptent ne rien planifier d’ici la conclusion d’un nouvel ALENA, et certaines d’entre elles retardent leurs projets d’investissements et d’embauche. En pareil cas, une résolution positive des négociations de l’ALENA dans un avenir rapproché pourrait laisser présager un nouvel essor de l’activité économique au Canada, si l’on considère que les projets reprendront leur cours.
Les perspectives à long terme suggèrent une baisse de l’intérêt pour les exportations internationales
Une analyse de l’enquête sur le long terme révèle des résultats préliminaires suggérant une baisse de la croissance de la capacité et de l’intérêt du Canada pour les exportations. Plus précisément, on observe que depuis 2015, de moins en moins d’entreprises ont commencé à exporter vers d’autres pays dans les deux années précédentes et qu’elles sont encore moins nombreuses à prévoir des exportations sur une période de deux ans. Bien que cette tendance ne soit pas irréversible, elle demeure préoccupante et mérite d’être observée de près. Il n’est donc pas surprenant qu’il y ait eu une baisse importante dans le nombre d’entreprises canadiennes prévoyant commencer à exporter aux États-Unis dans les deux prochaines années. De récentes annonces en provenance du gouvernement américain ont dissuadé certaines entreprises à pénétrer cet important marché, et si la tendance se maintient, les conséquences à long terme pourraient être fâcheuses. Les États-Unis représentent depuis longtemps un terrain d’essai stratégique pour les entreprises canadiennes pouvant difficilement être remplacé.
Parmi les exportateurs canadiens planifiant d’exporter vers de nouveaux marchés dans les deux prochaines années, pourcentage de ceux qui prévoient aussi exporter aux États-Unis.
Pour terminer sur une note positive, pourquoi ne pas voir le bon côté des choses concernant les négociations sur l’ALENA? Ces pourparlers très médiatisés sur les relations commerciales inciteront peut-être davantage de sociétés canadiennes à diversifier leurs activités internationales en perçant de nouveaux marchés hors des États-Unis. EDC a toujours été une fervente défenseure de la diversification, y voyant une approche sûre pour accroître les ventes et répartir les risques.