Jeff Keats aura toujours un faible pour la côte est du Canada, sa région natale. Mais quand il est question de changements climatiques, il est fermement convaincu qu’il faut collaborer à l’échelle internationale dès maintenant pour accélérer la décarbonation dans l’avenir.
« Selon moi, il faut agir pour le climat de la même façon que nous le ferions pour notre longévité et notre santé. Je veux profiter du présent, mais je veux aussi mener une belle et longue vie, en santé », explique Jeff Keats, nouveau responsable national des technologies propres, écosystèmes et connaissance des marchés à Exportation et développement Canada (EDC).
« Il n’y a pas de solution universelle pour atteindre les objectifs climatiques et ce n’est pas non plus la responsabilité d’une poignée d’organisations. Il nous faut une mobilisation générale », ajoute celui qui a commencé à travailler pour la société d’État en 2006 dans le cadre d’un programme de recrutement universitaire et qui, tout au long de sa carrière, a accepté des postes toujours plus stimulants.
« Les technologies propres canadiennes me passionnent et j’accorde de la valeur aux avantages que représentent la collaboration et les partenariats. Mais je crois que nous n’avançons pas assez vite ni au Canada ni à l’échelle mondiale ».
Celui qui est né à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et qui a grandi à Terre-Neuve, est titulaire d’une maîtrise en finances et commerce international de l’Université Memorial de Terre-Neuve. Il a aussi étudié en Allemagne pendant un semestre et détient un baccalauréat en administration des affaires de l’Université Acadia, en Nouvelle-Écosse.
Avec sa voix grave et puissante et son sens de l’humour, on pourrait facilement le prendre pour un annonceur à la radio ou un animateur à la télévision.
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Le secteur en forte croissance demeure résilient malgré des écueils importants.
Dans le cadre de ses nouvelles fonctions, Jeff Keats s’est joint à la dynamique responsable des technologies propres, Lynn Côté, lors de la dernière édition de la Semaine des technologies propres d’EDC, qui s’est tenue du 30 octobre au 6 novembre. Il décrit la combinaison d’événements virtuels et en personne comme « une merveilleuse semaine d’apprentissage, surtout pour moi ».
Nous lui avons demandé de nous parler de ses principales conclusions :
1. Le Canada a fait de grands progrès dans le domaine des technologies propres ces dix dernières années, mais d’incroyables possibilités nous attendent encore – tant à l’échelle nationale que mondiale.
C’est Carl Burlock, vice-président directeur et chef de la direction des affaires commerciales à EDC, qui a donné le coup d’envoi de l’événement en personne à Ottawa, le 30 octobre, en lançant une prédiction percutante : à l’échelle mondiale, le secteur des technologies propres devrait atteindre 26 000 milliards de dollars américains au cours des dix prochaines années, et d’ici 2030, il y aura 10 fois plus de véhicules électriques (VE) sur les routes.
L’augmentation des VE, a-t-il précisé, offrira une « excellente occasion de développer le secteur des minéraux critiques du Canada », ce qui contribuera à l’accélération de la décarbonation.
L’Agence internationale de l’énergie prévoit aussi que d’ici 2030 – dans à peine plus de six ans – l’énergie renouvelable comptera pour près de la moitié de l’approvisionnement mondial en électricité.
2. Pour atteindre nos objectifs climatiques, il faut en faire PLUS et le faire plus VITE!
La rapidité est primordiale parce qu’on s’attend à ce que 1,2 milliard de personnes soient déplacées à cause des changements climatiques.
Martin Beaudoin Nadeau, fondateur de Viridis Terra, une entreprise du secteur des technologies climatiques de Québec qui a pour objectif de revitaliser et de restaurer les terres dégradées partout dans le monde, est d’avis que pour progresser plus rapidement, il nous faut des « investisseurs patients » prêts à soutenir des projets aujourd’hui pour n’obtenir des gains environnementaux que plus tard.
« Si nous ne prenons pas de risques, les choses seront très, très difficiles pour les générations futures », se désole l’ingénieur forestier. EDC a sélectionné Viridis Terra comme l’une des principales entreprises innovantes à surveiller dans le secteur canadien en plein essor des technologies propres.
D’autres facteurs font en sorte que nous accusons du retard :
- Il y a plus d’incertitude maintenant dans l’écosystème qu’il y en a eu depuis bien des années, et ce, en raison :
o de la viabilité à long terme de certaines orientations politiques s’il advenait un changement de gouvernement;
o des difficultés posées par la coexistence de l’inflation et de taux d’intérêt élevés;
o des incitatifs vigoureux dans les marchés comme les États‑Unis et l’Union européenne (UE), qui attirent les investissements dans ces marchés;
o du temps qu’il faut pour la mise en œuvre des programmes du gouvernement du Canada. Par exemple, les crédits d’impôt à l’investissement ne sont pas encore assez bien définis pour que les entreprises se sentent suffisamment à l’aise de prendre des décisions d’investissement;
o de la loi sur la réduction de l’inflation [Inflation Reduction Act] aux États-Unis, qui offre des avantages fiscaux pour favoriser la croissance des technologies propres dans ce pays, ce qui rend la concurrence difficile pour les entreprises canadiennes. Ainsi, de plus en plus de nos jeunes pousses et de nos esprits novateurs du secteur des technologies propres migrent vers les États‑Unis ou ailleurs;
o de l’écart entre les capitaux de croissance et le financement de démarrage.
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3. Les partenariats sont un élément clé
L’expansion des technologies visant à accélérer la décarbonation dépend de la coordination et de la participation de tous les paliers de gouvernement ainsi que des institutions financières et des partenariats publics-privés, par exemple :
- Du financement de démarrage et des capitaux de croissance auxquels s’ajoute une combinaison de subventions, de capitaux propres et de prêts.
- Des programmes qui fournissent les fonds nécessaires aux projets, comme le Fonds pour les combustibles propres de Ressources naturelles Canada (RNCan).
- La Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) et d’autres partenaires qui offrent du financement assorti de conditions libérales pour accélérer l’élaboration de projets d’infrastructure, en parallèle avec le secteur privé.
- Du soutien et une mise en œuvre stratégique pour faire en sorte que les coûts demeurent concurrentiels au moment où les sociétés font la transition vers des procédés de production plus écologiques, plus particulièrement en réduisant les émissions des secteurs industriel et manufacturier traditionnellement difficiles à décarboner. Du point de vue commercial, le soutien politique contribue à la diminution des coûts liés à l’adoption de technologies à faibles émissions qui pourrait donner à ces entreprises un avantage par rapport aux sociétés internationales qui n’adoptent pas de technologies plus propres ou plus écologiques.
4. Il faut regarder au-delà de nos frontières
Le marché canadien a ses limites. Les entreprises de technologies propres qui souhaitent croître doivent songer à l’exportation. Le Canada est bien connu dans le monde pour ses technologies à faibles émissions de carbone, ses solutions énergétiques et ses innovations, mais on constate un retard sur le marché intérieur.
Pour que notre secteur des technologies propres puisse croître, il faudra vendre dans d’autres marchés, mais d’abord, il faudra adopter ces technologies ici.
Il devient essentiel de maintenir la compétitivité avec d’autres pays à l’heure où nous cherchons à stimuler l’exportation de nos technologies propres et à diversifier nos marchés. Ce ne sera possible que si nos gouvernements, nos sociétés, nos PME et nos investisseurs adoptent les technologies propres d’ici.
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5. Nous pouvons accélérer la décarbonation en exploitant les nouvelles technologies propres canadiennes
- Le Canada dispose de bien des forces dans les technologies existantes et les produits durables, dont les VE, les thermopompes, l’efficacité énergétique et le gaz naturel renouvelable. Il faut que le Canada adopte ces technologies éprouvées.
- Les parcs éoliens en mer peuvent aussi contribuer à étendre l’expertise canadienne en matière d’énergie renouvelable à de nouveaux marchés.
- En revanche, il faut accroître les investissements dans les secteurs émergents, comme l’hydrogène ainsi que le captage, l’utilisation et le stockage du carbone.
Nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs en ne comptant que sur une seule technologie. L’adoption de ces technologies au pays, la collaboration, des cadres stratégiques et du financement supplémentaire peuvent tous contribuer à l’atteinte de ces objectifs.
Les chiffres
29 milliards de dollars − La somme qu’EDC a fournie aux entreprises canadiennes de technologies propres depuis 2012.
3,7 % − La contribution des entreprises de technologies propres au PIB canadien.
188 000 − Le nombre de Canadiens qui travaillent dans le secteur des technologies propres.
51 milliards de dollars − La somme, en dollars américains, du capital de risque que les technologies propres ont attiré en 2022 à l’échelle mondiale.
1 700 milliards de dollars − La somme, en dollars américains, qui, selon l’Agence internationale de l’énergie, sera investie dans les technologies propres à l’échelle mondiale en 2023.