Le Taylor Swift Eras Tour est devenu un phénomène culturel avec maintenant plus d’une centaine de concerts donnés dans près de 20 pays. Les spectacles de cette star planétaire font le bonheur de ses millions de fans, mais ils suscitent aussi une réflexion en raison de leurs retombées économiques. Selon une estimation, la section américaine de la tournée a généré, à elle seule, pas moins de 6,8 milliards de dollars en dépenses de consommation. Pour sa part, l’Association américaine du voyage (la U.S. Travel Association) évalue que les Swifties injectent en moyenne 1 800 dollars dans les économies locales en frais de voyage et d’hébergement, en repas au restaurant et en achats divers. Alors même Taylor Swift prépare ses concerts de Toronto et de Vancouver prévus cet automne, il semble à propos d'examiner le rôle du divertissement et d'autres exportations de services au sein de l'économie canadienne.

Selon les experts de l'industrie, Toronto est le troisième marché mondial pour les concerts, après New York et Los Angeles. Les fans qui assistent aux spectacles dans la Ville Reine dépensent beaucoup dans les entreprises locales, que ce soit en frais d’hôtels et en sorties au resto, en achats dans les commerces de détail ou encore en transport. Or, l’attrait du Canada dans l'univers du divertissement va au-delà des concerts. La Coupe du monde de la FIFA de 2026, qui se tiendra en Amérique du Nord, devrait elle aussi être une manne pour le tourisme. Tout comme les concerts, les grands événements sportifs attirent des visiteurs d'autres pays et alimentent une activité économique substantielle. Mais ce n'est pas tout : ils sont aussi une vitrine pour les capacités du Canada d'accueillir des rendez-vous sportifs majeurs de portée mondiale, sans compter qu’ils présentent le Canada comme une destination de choix pour les voyages internationaux.

Le secteur de l’enseignement est aussi un élément important du secteur canadien des exportations de services. Rappelons que le Canada a délivré plus d'un million de permis à des étudiants l'an dernier. Cet afflux d'étudiants génère des revenus et favorise le transfert des savoirs, la recherche et le développement ainsi que les échanges culturels, autant d'éléments qui confortent le statut du Canada en tant que « puissance mondiale tranquille ». À ce titre, il est bon de souligner que le Canada exporte des marchandises, certes, mais aussi des services…

Entre 2019 et 2023, les exportations canadiennes ont enregistré une croissance d'à peine 1,7 %. Pendant le même intervalle, les exportations de services ont bondi de 8,6 %. Grâce à cette impulsion, les exportations de services ont constitué 22 % de nos ventes à l'étranger l'an dernier, contre 18 % en 2017 – soit une part supérieure aux exportations du secteur de l'automobile ou de l'énergie. Étant donné que les services comme le transport et l'intermédiation financière se retrouvent dans les exportations de marchandises, on peut supposer que la valeur ajoutée par les exportations de services est sans doute beaucoup plus élevée. D’ailleurs, ces exportations contribuent de plus en plus à la création d’emplois et à l’activité économique. 


Le Canada a plusieurs atouts en ce qui a trait au potentiel de ses exportations de services. Il possède une main-d'œuvre bilingue, ce qui rend notre pays plus attractif dans des secteurs comme l’enseignement, les services-conseils et d'autres services professionnels. De surcroît, nos universités de calibre mondial attirent des étudiants internationaux, mais aussi des professionnels et des gens des corps de métier hautement qualifiés. Le fait que le Canada abrite une industrie du cinéma dynamique et des centres des arts de la scène florissants renforce le potentiel des exportations culturelles et aide à attirer des productions internationales, ce qui dynamise encore plus la croissance des industries créatives au pays. Et le Canada possède une autre corde à son arc : sa proximité et ses liens avec les États-Unis en font une rampe de lancement peu coûteuse vers le plus vaste marché de la planète.

La conjoncture économique est favorable au Canada. En effet, les destinations touristiques habituelles en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas souffrent du surtourisme. Là-bas, les administrations locales prennent des mesures pour gérer le flot de touristes. Autre élément digne de mention : le mouvement de relocalisation de proximité des chaînes d’approvisionnement de l’industrie de la fabrication vers des marchés avec lesquels le Canada entretient traditionnellement de solides relations est porteur de débouchés pour les entreprises canadiennes de services commerciaux. La montée en puissance des politiques populistes – et de la rhétorique qui l’accompagne – au sein des marchés développés contribue aussi à faire du Canada une destination prisée pour l’industrie du talent à l’échelle internationale. Enfin, au gré de la réduction des coûts d’emprunt, l’activité mondiale entourant le capital-investissement, les fusions et acquisitions et le capital de risque offre des opportunités pour les centres financiers et technologiques bien établis, comme ceux de Toronto et de Montréal.

Conclusion?

L'évolution des exportations canadiennes de services et notre influence grandissante dans le marché mondial des services témoignent du dynamisme de l’économie canadienne. Cela dit, nous pouvons en faire davantage pour rehausser la compétitivité des exportateurs de services d’ici et, du même coup, aider le Canada à progresser dans la sphère des exportations à valeur ajoutée. 

Pour réaliser tout le potentiel des exportations canadiennes de services, il faudra des investissements soutenus dans des domaines comme le tourisme, le logement, les infrastructures, le transport, le développement des talents et l’immigration. Il faudra aussi offrir un soutien plus concret aux PME, les véritables fleurons de ce secteur. Si des efforts concertés pour stimuler l’innovation et la créativité sont effectivement déployés, l’avenir s’annonce prometteur pour la filière canadienne des exportations de services.

Nous tenons à remercier chaleureusement Hassan Goreja, économiste principal au Centre d’information économique et politique d’EDC, pour sa contribution à la présente édition.

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