Pour les prévisionnistes, décembre est habituellement le moment de faire le bilan de l’année écoulée, de célébrer les bons coups et (plus fréquemment) de prendre acte des moins bons, puis de se pencher sur leurs implications futures.

Les Services économiques d’EDC sont fiers de ne pas s’être laissé convaincre par ceux qui prévoyaient une récession. Cela dit, nous reconnaissons avoir exagéré notre scénario défavorable, sans doute parce que nous avions été trop marqués par la conjoncture récente et par la succession sans fin d’événements « inédits ». Au bout du compte, l’économie mondiale a déjoué le pronostic de sa chute imminente grâce à la résilience du consommateur américain, au retour à la normale des activités en Chine et à un hiver exceptionnellement clément en Europe.

L’assouplissement tant attendu des chaînes d’approvisionnement mondiales – qui s’est accéléré pendant l’année – a permis aux cours des engrais, du pétrole brut, du gaz naturel et des denrées alimentaires de revenir au niveau de 2021, soit d’avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Par ailleurs, les marchés du travail dans plusieurs grandes économies ont commencé à se desserrer cet été; parallèlement, les taux de chômage ont progressivement grimpé dans des pays comme le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et la Chine, ce qui a freiné la croissance des salaires.

Nous notons – sans perdre de vue les répercussions des conflits de travail et l’incertitude croissante sur le plan géopolitique – que la diminution des tensions sur les coûts a conduit à une désinflation rapide à l’échelle du globe. Pour preuve : plus de la moitié des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) affichent maintenant un taux d’inflation annuel inférieur ou égal à 4 %. Au Canada et aux États-Unis, le taux d’inflation a chuté de façon spectaculaire par rapport aux sommets de 2022 et approche désormais la cible fixée.

Même si l’augmentation des prix a été plus modérée cette année en raison de leur envolée de l’an dernier, la réduction de l’inflation a été un objectif chèrement acquis. Les hausses notables des taux directeurs décrétées par les banques centrales ont imposé des coûts substantiels aux entreprises et aux consommateurs. L’endettement est à présent plus coûteux, et l’augmentation du coût du service de la dette comprime les marges des entreprises et épuise l’épargne excédentaire des consommateurs. Les ménages canadiens sont particulièrement concernés, avec des ratios dette-revenus parmi les plus élevés de l’OCDE, bien supérieurs à ceux de leurs homologues américains qui bénéficient aussi du fait qu’il y a plus de prêts hypothécaires à taux fixe à long terme aux États-Unis.

Le coût de la dette est également un sujet de préoccupation pour de nombreux gouvernements qui doivent maintenant assainir leur bilan au lendemain de la mise en place des programmes d’aide durant la crise de la COVID-19. Or, les déficits restent élevés en raison de la diminution des recettes et des dépenses supplémentaires à consacrer à de nouvelles priorités comme les infrastructures, la transition énergétique et la sécurité. Dans ce contexte, la politique budgétaire des économies développées ne devrait pas être d’un très grand secours. En revanche, les gouvernements de nombreux marchés en développement doivent se focaliser sur la soutenabilité de la dette, avec en toile de fond des taux d’intérêt plus élevés à l’échelle planétaire.


Certaines économies sont confrontées à des défis qui vont au-delà du rebond cyclique consécutif à la détente de l’activité en temps de pandémie. L’Europe, par exemple, doit envisager un avenir où elle n’a plus accès à des sources d’énergie russe bon marché. La Chine, pour sa part, se débat avec un modèle de croissance en pleine évolution; à cela s’ajoute la politique pratiquée par de grandes puissances qui vient réduire la capacité de la Chine à attirer des investissements étrangers, ce qui soulève des questions quant à l’aspiration de ce pays à l’autosuffisance. L’économie américaine, enfin, doit déterminer la main-d’œuvre et les ressources dont elle a besoin pour maintenir son leadership économique.

À l’origine de ces défis, on trouve le mouvement mondial vers la réduction des risques dans une économie encore très mondialisée. La nécessité de rapprocher les chaînes d’approvisionnement – sur le plan géographique du moins d'un point de vue idéologique – a été mise en évidence par le risque accru de perturbations géopolitiques et la propagation rapide de pathogènes humains, ainsi que par la vulnérabilité de notre infrastructure commerciale aux conséquences du changement climatique et de l’erreur humaine. Cet impératif de résilience aura des répercussions sur le commerce mondial et les flux financiers, non seulement l’an prochain, mais possiblement dans les décennies à venir.

Conclusion

Les exportateurs canadiens doivent s’attendre à ce que la demande des consommateurs reste molle en 2024, puisque l’épargne accumulée lors de la pandémie se tarira, les taux de chômage augmenteront et le lourd fardeau de la dette pèsera sur les affaires. Les taux d’intérêt commenceront à redescendre en milieu d’année, une fois que l’inflation sera revenue dans la fourchette cible, ce qui donnera un coup de fouet à l’économie mondiale vers la fin de l’année. D’ici là, les entreprises devront composer avec un regain des risques géopolitiques et de nouvelles tendances commerciales.

Les perspectives seront différentes selon le secteur et la région concernés. Un récent rapport d’EDC intitulé Secteurs en vedette fournit des renseignements détaillés sur les secteurs et les marchés prometteurs. Par ailleurs, notre dernière édition de l’Analyse trimestrielle des risques pays peut aider les exportateurs à s’adapter à l’instabilité engendrée par les risques pays. En terminant, nous vous invitons à lire l’édition de l’hiver 2024 des Perspectives économiques mondiales d’EDC, qui paraîtra en janvier.

Nous tenons à remercier chaleureusement William Thomas, chercheur aux Services économiques d’EDC pour sa contribution à la présente édition.

Toute l’équipe des Services économiques d’EDC vous souhaite un très joyeux temps des Fêtes et vous offre ses meilleurs vœux de bonheur et de santé pour 2024! 

N’oubliez pas que votre avis est très important pour les Services économiques d’EDC. Si vous avez des idées de sujets à nous proposer, n’hésitez pas à nous les communiquer à l’adresse economics@edc.ca, et nous ferons de notre mieux pour les traiter dans une édition future.