Que l’on soit optimiste ou pessimiste, le dernier indice de confiance commerciale d’EDC, qui jette à la fois un regard sur la dernière année et celle à venir, a de quoi pour tout le monde – signes encourageants et nuages sombres à l’horizon pour les exportateurs canadiens.
Signes encourageants
Commençons par les bonnes nouvelles : notre sondage semestriel auprès de 1 000 exportateurs canadiens révèle que même durant l’âpre renégociation de l’ALENA, les commandes des clients aux États-Unis sont demeurées soutenues tout au long de 2018. La solidité de l’économie américaine explique en majeure partie pourquoi le volume des exportations canadiennes de marchandise excède de 10 % celui d’il y a un an.
Selon ceux qui sont dans le « feu de l’action », les perspectives des exportations canadiennes en 2019 demeurent prometteuses – au deuxième rang des meilleures perspectives depuis la grande récession. De fait, près du deux tiers des répondants s’attendent à une croissance de leurs exportations durant les six prochains mois.
Les exportations du Canada devraient augmenter durant les six prochains mois (% des répondants)
Source : Sondage sur l’indice de confiance commerciale d’EDC
La demande extérieure devrait être source d’avantages pour le Canada, près de la moitié des exportateurs planifiant recruter davantage d’employés, bien qu’ils aient de plus en plus de difficulté à trouver de la main d’œuvre qualifiée. À l’international, les perspectives à court terme des ventes des sociétés affiliées à l’étranger et de l’investissement direct sortant excèdent toujours les moyennes antérieures.
La nouvelle la plus réjouissante de la dernière année pour les exportateurs canadiens a sans doute été l’annonce de l’accord trilatéral conclu en septembre pour remplacer l’ALÉNA, soit l’ACEUM (Accord Canada–États-Unis–Mexique). Les 14 mois de négociation n’ont pas manqué de tribulations, il n’y a qu’à penser aux menaces des États-Unis de se retirer de l’accord. C’est cette menace qui était la première préoccupation des exportateurs canadiens, comme en témoignaient les sondages d’EDC et ses discussions avec les entreprises de partout au pays – en particulier les fabricants du sud-ouest de l’Ontario, dont les chaînes d’approvisionnement sont profondément intégrées à l’économie des États-Unis.
Globalement, plus du trois quarts des répondants avaient une perception positive ou neutre de l’ACEUM. Avec le recul, il est évident que le regain d’incertitude découlant de la renégociation a freiné les plans d’investissement au Canada en 2018.
Consultez l’aperçu des résultats du sondage sur l’indice de confiance commerciale en fin de 2018.
L’intermittence des négociations a placé les exportateurs canadiens devant des choix difficiles : beaucoup devaient composer à la fois avec la nécessité d’investir – commandes importantes et capacité de production excédentaire limitée obligent – et avec l’incertitude entourant les futures règles du commerce nord-américain. Parce que les pourparlers traînaient en longueur, des entreprises ont décidé sciemment de reporter à plus tard des investissements à long terme de taille, la construction d’usines, entre autres, en espérant qu’émergeraient avec le temps des règles commerciales claires pouvant guider leurs décisions.
L’ACEUM étant en voie d’entérinement par les gouvernements nord-américains, il faut s’attendre à ce que l’hésitation se dissipe en 2019. Les résultats du sondage avant et après la conclusion de l’accord montrent un recul important du report d’investissements et une reprise notable de l’intention d’investir et de recruter.
Nuages sombres
C’est à l’échelle mondiale que les perspectives s’assombrissent pour 2019. Tout d’abord, on note un abaissement des attentes à court terme concernant l’économie mondiale. Malgré la bonne performance de l’économie américaine, la croissance en Europe et dans les pays émergents d’Asie a ralenti tout au long de 2018, de même que la croissance du commerce international.
Ralentissement de la croissance mondiale des exportations de marchandises – moyenne sur trois mois (variation en pourcentage d’une année à l’autre)
Source: CPB Netherlands
Le contexte commercial général et la direction que prendront les tensions commerciales internationales viennent au deuxième rang des préoccupations. L’ACEUM a été conclu, mais les craintes des exportateurs n’ont pas toutes été soulagées; elles se sont plutôt déplacées. En effet, l’ACEUM s’inscrit dans une stratégie américaine plus vaste que l’administration Trump continuera certainement d’appliquer en 2019, qui vise à obtenir des concessions commerciales en vue de « rééquilibrer » les accords actuels en faveur des Américains.
D’un point de vue macroéconomique, même si les inquiétudes liées à l’ACEUM s’atténuent, une part non négligeable des répondants (32 %) affirment que l’intensification du protectionnisme nuit à leurs stratégies mondiales. Les effets de telles mesures se font sentir de plus d’une façon; pensons notamment aux doctrines et prescriptions « achat local ou américain » et à l’augmentation générale des coûts, qui réduisent notre capacité concurrentielle à l’échelle mondiale.
Pour la première fois depuis longtemps, les tarifs douaniers et les obstacles au commerce sont les principales difficultés auxquelles se butent les exportateurs qui cherchent à maintenir ou à étendre leurs activités à l’étranger. Oui, le différend tarifaire sino-américain connaît une accalmie, mais, le Brexit pourrait entraîner de nouvelles complications d’ici le 29 mars, date butoir pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, et les États-Unis prévoient des pourparlers bilatéraux avec l’UE et le Japon (verrons-nous le président Trump brandir une nouvelle fois la menace de tarifs douaniers sur les importations d’automobiles?).
Du point de vue strictement canadien, les exportateurs sont mécontents de voir que l’ACEUM n’a pas sonné le glas des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium. Le pire revers de 2018 a sans aucun doute été le refus des États-Unis d’accorder une dispense permanente des tarifs de sécurité nationale sur ces matières à ses alliés de l’OTAN, dont le Canada et les pays membres de l’UE.
Selon 34 % des répondants, ces tarifs, qui entraînent une hausse des coûts de production et un resserrement de leurs marges bénéficiaires, ont nui aux affaires de leur entreprise aux États-Unis. Les entreprises touchées disent devoir augmenter leurs prix, hausse dont les effets commencent à se faire sentir chez les consommateurs finaux, trouver d’autres marchés ou d’autres fournisseurs et s’approvisionner localement pour éviter les tarifs douaniers.
L’année à venir
Pour le début de 2019, les optimistes peuvent souligner les solides perspectives des exportations canadiennes, qui sont soutenues principalement par une économie américaine qui tourne à un régime supérieur à son régime de croisière habituel, et le soulagement apporté par la fin des pourparlers sur l’ALENA, qui devrait permettre de ramener à l’avant-scène des investissements laissés de côté.
Cela dit, les pessimistes, eux, peuvent rappeler que la croissance mondiale ralentit et qu’il est bien possible que les obstacles au commerce s’intensifient. L’avenir le dira. En attendant, je vous invite à vous joindre à moi pour un webinaire gratuit qui se tiendra le 16 janvier. On y traitera plus en détail des résultats du sondage et on répondra à vos questions.