Tout exportateur a comme priorité de se faire payer pour la marchandise expédiée à ses clients. Mais lorsqu’il est question de contrats internationaux, il ne s’agit pas simplement de produire une facture.
En mars dernier, j’ai été invité en ma qualité de copropriétaire et fondateur d’Exportspark Services inc. (en anglais seulement) – une entreprise canadienne offrant des formations virtuelles sur le commerce international ainsi que des services-conseils à des entreprises et à des agences de développement économique – à prendre part au webinaire d’Exportation et développement Canada (EDC) intitulé Comprendre toutes les clauses des contrats internationaux.
Ce webinaire portait sur l’importance de bien rédiger les contrats et d’y prévoir les bons Incoterms (lien en anglais seulement) pour éviter les risques sur les marchés étrangers et favoriser la croissance de l’entreprise. À la suite de la discussion, qui a duré une heure, nous avons reçu plusieurs questions sur la comptabilisation des produits et sur l’incidence des Incoterms choisis. Voici donc mes explications sur le sujet.
En quoi consistent les Incoterms?
Les Incoterms consistent en 11 termes commerciaux reconnus universellement et utilisés dans les contrats de vente internationale. Ils ont pour but de définir clairement les rôles et les responsabilités de l’acheteur et du vendeur, le transfert des risques de même que tous les coûts associés à l’expédition d’un produit à l’extérieur du Canada. Rédigés par la Chambre de commerce internationale (CCI), les Incoterms sont formés de courtes phrases et d’acronymes de trois lettres, par exemple EXW (départ usine) ou DAP (rendu au lieu de destination), pour simplifier les contrats, éliminer la confusion et réduire les problèmes liés à l’expédition.
Les Inconterms se divisent en quatre groupes :
- Groupe E – EXW
- Groupe F – franco transporteur (FCA); franco le long du navire (FAS); franco à bord (FOB)
- Groupe C – port payé jusqu’au lieu de destination désigné (CPT); port payé, assurance comprise, jusqu’au lieu de destination désigné (CIP); coût et fret (CFR); coût, assurance et fret (CIF)
- Groupe D – DAP; rendu au lieu de destination déchargé (DPU); rendu droits acquittés (DDP).
Vous devriez également consulter
Apprenez à maîtriser les règles des Incotermsᴹᴰ 2020 et à connaître les règles d’origine grâce à notre webinaire.
Comment savoir quel Incoterm choisir?
Habituellement, on choisit l’Incoterm en fonction du risque ou des coûts que l’acheteur ou le vendeur est prêt à assumer ou en mesure de le faire. Mais ce choix dépend aussi du moment dans le processus de transaction où le vendeur peut comptabiliser les produits puisque différents lieux de destination et transferts sont prévus dans chacun des Incoterms.
Qu’entend-on par comptabilisation des produits?
La comptabilisation des produits est un principe comptable visant à déterminer le moment auquel l’entreprise génère un produit. Selon les principes comptables généralement reconnus, la comptabilisation des produits a lieu à la réalisation de la transaction. Si la marchandise nécessite une installation ou de la formation par exemple, la date de la livraison initiale à la destination ne sera pas la même que la date de la réalisation de la transaction comme indiqué dans le contrat.
La plupart du temps, la réalisation de la transaction correspond au moment où le vendeur reçoit de l’acheteur la confirmation de la livraison de la marchandise. Le vendeur peut alors établir la facture et réclamer le paiement. L’Incoterm choisi est donc un élément clé quand vient le temps de déterminer le moment où le vendeur peut officiellement procéder à la facturation puisque celle-ci dépend de la confirmation de l’acheteur.
Quelles sont les différences entre les 11 Incoterms?
EXW, ou « départ usine », permet au vendeur de faire le transfert au moment même où il met le produit à la disposition de l’acheteur. Ce peut être au moment où le vendeur place le produit au quai de chargement, prêt à ce que le transporteur de l’acheteur le ramasse. Le vendeur peut produire sa facture presque immédiatement après que le produit a quitté la tablette de l’entrepôt pour être préparé à l’expédition. L’Incoterm EXW pose bien des difficultés à l’acheteur, mais il est populaire auprès des vendeurs qui souhaitent comptabiliser les produits le jour même.
Les Incoterms du groupe F obligent le vendeur à charger la marchandise, à administrer le processus d’exportation et à produire un document reconnu lui permettant de procéder à la facturation et de comptabiliser les produits. Le risque associé à la marchandise est transféré à l’emplacement du vendeur ou non loin du port d’exportation tôt dans le processus d’expédition réduisant ainsi les obligations de l’acheteur et les risques qu’il doit assumer. Les termes du groupe F sont un choix populaire parce qu’ils réduisent les risques que doit assumer l’acheteur et facilitent la comptabilisation des produits du côté du vendeur.
Selon les termes du groupe C, c’est le vendeur qui doit assumer les coûts de transport à la destination, mais il peut aussi hâter le transfert du risque en livrant la marchandise au premier transporteur en territoire national. Le vendeur a l’avantage de pouvoir transférer le risque tôt dans le processus d’expédition et d’obtenir un document d’expédition standard qui prouve le transfert de propriété et permet la comptabilisation des produits. L’acheteur de son côté n’a pas à assumer les coûts liés à l’expédition et à l’assurance de la marchandise puisque c’est au vendeur qu’incombe cette responsabilité.
Selon les termes du groupe D, c’est au vendeur qu’incombent la plupart des responsabilités. De plus, les délais associés à la comptabilisation des produits sont plus longs, puisque le vendeur est responsable de la marchandise jusqu’à destination. Si l’expédition se fait par navire, ce délai peut s’étendre sur un mois, voire plus. Une fois que l’acheteur a reçu la marchandise, le vendeur peut conclure la transaction et comptabiliser les produits.
Vous devriez également consulter
Exécutez vos plans d’affaires mondiaux plus vite. Perfectionnez-vous rapidement et gratuitement.
Il est essentiel de bien se renseigner
Évidemment, le vendeur cherchera toujours à raccourcir la période entre la livraison et le paiement. Mais l’acheteur doit consentir à ces modalités et peut même ajouter des conditions au contrat de vente pour exiger que le vendeur assume encore plus d’obligations. En pareil cas, le vendeur doit s’assurer de bien comprendre toutes les obligations contractuelles s’ajoutant à celles qu’imposent les Incoterms choisis.
L’équipe des finances doit tenir compte d’un concept important : la différence entre la date à laquelle les stocks sont mis à jour, la date du transfert du risque et la date de réception de la marchandise indiquée dans les documents de l’acheteur.
Prenons ce cas de figure : le vendeur prend un produit dans les stocks, le jour où le premier transporteur ramasse la marchandise et, le cas échéant, les délais dans la délivrance du connaissement (document juridique délivré par le transporteur à un expéditeur précisant ce qui est expédié, la provenance et la destination). Si le vendeur souhaite expédier la marchandise avant la fin de l’exercice financier et que le connaissement est daté du nouvel exercice, la comptabilisation des produits sera touchée à moins que soit appliqué le bon Incoterm, par exemple EXW.
Il est très important que vos équipes des finances et de l’exploitation travaillent avec les équipes des ventes et de l’expédition pour que les Incoterms prévus au contrat favorisent la comptabilisation des produits de votre entreprise.
Comment éviter les retards et les coûts supplémentaires?
L’application du mauvais Incoterm ou le fait qu’un Incoterm soit prévu à un contrat depuis des années sans que vous le sachiez pourrait vous forcer à attendre des mois avant de pouvoir clore un contrat de vente ou vous obliger à entreprendre un long processus pénible pour ajuster vos bilans antérieurs.
« À titre de conseiller à EDC, j’ai moi-même été témoin des répercussions de l’application du mauvais Incoterm sur une entreprise exportatrice. Des malentendus peuvent occasionner des coûts et des retards inattendus qui peuvent nuire au résultat net », explique Emiliano Introcaso, Professionnel accrédité en commerce international (PACI).
« Beaucoup d’employés dans les entreprises qui font affaire avec les chaînes d’approvisionnement internationales connaissent mal les Incoterms. Cette lacune peut donner lieu à des erreurs coûteuses. »
« Une bonne formation est un investissement dans la croissance de votre entreprise. Ne laissez pas votre prospérité au hasard : assurez-vous que votre équipe a les connaissances qu’il faut », conclut-il.