Si la nuit est la plus profonde juste avant le lever du jour, alors les premiers mois de 2021 pourraient se révéler l’épisode le plus sombre de la pandémie dans la plupart des régions du globe. 

D’un point de vue de santé publique, la distribution de vaccins connaît son lot de difficultés, ce qui oblige plusieurs pays à se reconfiner de façon prolongée pour une deuxième, voire une troisième fois. Les conséquences de la crise de la COVID-19 se répercutent aussi sur les économies moins robustes exposées à des risques plus graves, leur gouvernement respectif ayant mis en place de vastes programmes afin d’aider la population et les entreprises à composer avec les effets de la pandémie.

Afin d’appuyer les entreprises canadiennes souhaitant évaluer et comprendre les risques sur les marchés mondiaux, Exportation et développement Canada (EDC) établit la notation d’une foule de risques pays, dont la « probabilité de défaut souverain » qui, pour l’essentiel, mesure le risque qu’un gouvernement soit incapable d’honorer ses obligations de paiement. 

En 2020, les Services économiques d’EDC ont actualisé leur notation de ce risque pour plus de 190 pays et territoires. En raison du caractère exceptionnel de la pandémie, du choc des cours pétroliers et des retombées de ces événements, EDC a revu sa notation de ce risque pour 94 pays – c’est là une première et près de trois plus qu’en 2019.

Dans la majorité des cas (en l’occurrence 89 %), la notation de ce risque a été déclassée par rapport à celle de 2020, ce qui témoigne à la fois de l’augmentation des tensions et de la position nettement moins favorable de plusieurs de ces pays en 2021 alors que la pandémie sévit toujours. Cela dit, les effets de la crise de la COVID-19 ne sont pas ressentis de façon égale par les pays touchés; naturellement, les changements apportés à notre notation rendent compte de cette réalité.  

Seule une poignée de pays industrialisés comme le Royaume-Uni, la France et l’Italie ont fait l’objet d’une décote. On s’attend d’ailleurs à ce que les grandes économies du monde puissent surmonter les difficultés découlant de la pandémie, notamment en tirant parti des éléments suivants : 

  • une monnaie forte; 
  • une importante capacité d’endettement grâce à un accès facile aux marchés des capitaux; 
  • des taux d’intérêt incroyablement bas;
  • la crédibilité de leurs systèmes politiques et de leurs autorités monétaires

Même s’ils sont plus endettés au lendemain de cette crise, les pays dotés d’une économie puissante et diversifiée seront en mesure de gérer leur endettement pour une raison toute simple : les taux d’intérêt resteront bas pendant un bon moment. Et comme bon nombre de ces pays disposent des capacités pour mener à bien des campagnes de vaccination, ils devraient voir se dissiper les nuages ayant assombri le ciel de leur économie en 2020 et bénéficier en 2021 d’un renouveau sur les fronts de la stabilité et de la croissance.


En 2020, le gros des décotes a visé les marchés émergents, mais cette situation voile des distinctions cruciales au sujet des perspectives pour les risques. Pour environ le tiers des autres pays, le fait marquant de 2020 a été la pandémie, certes, mais aussi le deuxième coup dur associé à la chute des cours pétroliers (rappelons-nous : le repli de la demande est survenu à un bien mauvais moment, soit pendant la guerre des prix entre l’Arabie saoudite et la Russie). Les finances publiques fortement axées sur les ressources du Koweït, du Nigeria et d’Oman profiteront en 2021 de la diminution des cas de COVID-19, du raffermissement de la demande pétrolière et des cours de l’or noir, ainsi que du retour des dollars, autant d’éléments qui les aideront à s’attaquer à des déficits imposants. Toutefois, parce qu’ils ont contracté des dettes massives pendant la pandémie, ces gouvernements seront plus vulnérables à tout nouveau choc des cours pétroliers. 

Pour les gouvernements dont l’économie est tributaire du tourisme – par exemple le Costa Rica, la République dominicaine et les Bahamas –, le décalage dans la relance pourrait persister jusqu’en 2022 et même 2023; autrement dit, jusqu’au retour d’un nombre suffisant de passagers sur des vols internationaux. Chez les pays à faible et moyen revenus ayant fait appel au soutien du Groupe des 20, du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, la reprise pourrait prendre encore plus de temps à se confirmer alors qu’ils négocient leur retour à la stabilité. 

Pour ces deux groupes de pays, il y a fort à parier que les risques resteront élevés en 2021 jusqu’à ce que la croissance et la stabilité présentes dans les autres régions s’installent à leur tour chez eux. Or, ces pays sont confrontés à des perspectives de croissance moroses, un fort niveau d’endettement et un accès plus limité aux marchés obligataires mondiaux; tout contretemps à entrer dans l’ère post-pandémie mettrait à l’épreuve leurs finances publiques et accentuerait les risques.

Conclusion?

Dans plusieurs régions du monde, le début de 2021 marquera sans doute un tournant. Malgré des avancées contre la pandémie, les finances publiques sont exposées à des risques plus importants que ceux observés lors de l’après-guerre en raison du niveau plus élevé d’endettement et de la timide croissance enregistrée en 2020. Pour mieux comprendre la voie vers la reprise, il est capital de suivre de près les changements touchant les risques pays et la conjoncture économique. Voilà pourquoi Analyse trimestrielle des risques pays d’EDC reste une lecture incontournable.