Les consommateurs contribuent le plus au dynamisme de l’économie mondiale. Leur contribution s’élève à 60 % du PIB dans la plupart des économies, et aux États-Unis, la première économie de la planète, cette part grimpe à 70 %. Quels sont les impacts de la crise planétaire de la COVID-19 sur le consommateur et quelle est leur influence sur les prévisions?
Plus que tout autre acteur économique, le consommateur se portait plutôt bien au début de cette crise. Les consommateurs canadiens n’affichaient pas une performance particulièrement éclatante. Toutefois, aux États-Unis et en Europe, le consommateur profitait d’un faible taux de chômage, du taux de participation de la main-d’œuvre le plus élevé depuis la grande récession, d’augmentations salariales respectables et de taux d’épargne le plaçant dans une situation financière plus favorable qu’en 2008. En fait, la consommation semblait relativement épargnée par la tourmente dans la sphère des politiques commerciales et par d’autres perturbations économiques. Sur le front de la main-d’œuvre, pour la première fois depuis longtemps, les travailleurs avaient le beau jeu sur le marché de l’emploi, à tel point que les pénuries risquaient à court terme de provoquer une inflation des salaires.
La réaction initiale des consommateurs dans les économies développées a été de faire preuve d’optimisme. La vie continuait à la cadence habituelle. Les habitudes d’achat restaient inchangées, tout comme l'intérêt pour les voyages, et ce, même vers des destinations considérées aujourd’hui comme à risques élevés. Dans l’ensemble, les consommateurs poursuivaient leurs activités en toute liberté et la confiance était au beau fixe. À vrai dire, au départ, la crise était perçue comme un événement « se déroulant loin d’ici », et soulevait donc peu de préoccupations.
Tout cela a manifestement changé. Le premier signe de cette inquiétude a été l’effet négatif anticipé de la crise sur les chaînes d’approvisionnement. Le raisonnement était simple : advenant un arrêt de la production, le consommateur serait privé des biens les plus essentiels. Ainsi, ce qui a commencé comme une frénésie d’achat pour du papier hygiénique – frénésie alimentée par la spéculation et les rumeurs – s’est généralisée. Bientôt, d’autres rayons dans les épiceries se sont aussi vidés. La chaîne d’approvisionnement alimentaire se comporte remarquablement bien compte tenu de la montée en flèche de la demande. Cette dynamique, si elle s’intensifie, pourrait facilement épuiser les ressources du système. À cet égard, les actions rapides de la part des décideurs – dans le but d’assurer le bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement alimentaire – créent les conditions les plus favorables depuis plusieurs d’années pour les acteurs des réseaux de production, de transformation et de distribution de denrées alimentaires; d’ailleurs, ces secteurs pourraient compter parmi les moins éprouvés par la crise actuelle.
La deuxième ronde d’impacts pourrait être plus importante. En plus des préoccupations grandissantes liées à l'accessibilité des produits, la sécurité d’emploi devient un enjeu majeur. Pendant la semaine du 23 mars, aux États-Unis comme au Canada, les demandes d’assurance emploi se sont envolées à des taux inédits, avec l’ajout de quelque trois millions de nouveaux chômeurs sur le territoire américain en à peine une semaine. À ce rythme, le taux de chômage américain éclipsera bientôt le niveau atteint en 2009 et pourrait le dépasser. Dans l’immédiat, il s’agit de la plus grave menace à la croissance mondiale. Et même si on s’attend à ce que ce revers de fortune soit passager, il aura des conséquences dévastatrices sur la performance générale.
À ce stade-ci, les perspectives sont moroses. Pourtant, face au repli fulgurant de l’activité, les gouvernements ont lancé d’imposants plans de relance qui sont déjà plus vastes que ceux mis en œuvre en 2009. Les plans mis en place par de nombreux pays – et de plus en plus de nations emboîtent le pas – ciblent le soutien au revenu; ces plans permettront de compenser de manière importante, mais incomplète, le fléchissement de l’activité qui est attendu.
En règle générale, les impacts d’un virus sur l’économie sont de courte durée. Les épisodes passés du même genre nous révèlent qu’une bonne partie de l’activité perdue est par la suite regagnée. Et c’est particulièrement vrai pour les personnes qui maintiennent leur revenu pendant le confinement et réduisent leurs achats. Ces consommateurs en puissance sont des contributeurs majeurs à la demande comprimée et agiront comme des moteurs de la relance au lendemain de la crise.
La crise de la COVID-19 se démarque par son ampleur, et par la possibilité que ses nombreuses répercussions persistent dans le temps. Dans une large mesure, cela dépendra de la gravité des séquelles sur l’état d’esprit des consommateurs. Si, collectivement, les consommateurs sont habités par la crainte du prochain épisode du virus, on pourrait alors observer des effets continus sur les comportements d’achat, ce qui freinerait l’activité économique d’une façon plus ou moins permanente. Ce ne fut pas le cas lors de l’épisode du SRAS ou d’autres incidents notables causés par un virus, mais l’économie reste confrontée à ce type de danger lors de crises comme celle que nous connaissons.
Conclusion?
Sur le plan économique, la contribution des consommateurs est cruciale; leur rôle sera déterminant pour aider l’économie mondiale à surmonter la crise de la COVID-19. L’ampleur de la crise actuelle est une source d’inquiétude. Dans ce contexte, il est primordial de rappeler que malgré les mesures radicales prises pour endiguer et traverser la crise, si l’histoire se répète, il y aura éventuellement un « retour à la normale », et cela nous ne devons pas l’oublier.