Le 8 mars dernier marquait le premier anniversaire de la signature du dernier accord de libre-échange du Canada : l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), qui élimine la plupart des droits de douanes, tous secteurs confondus. Il a toutefois fallu plusieurs mois pour le mettre en œuvre et, en octobre 2018, seuls le Canada, l’Australie, le Japon, le Mexique, la Nouvelle-Zélande et Singapour – soit six des onze nations participantes – avaient ratifié l’Accord, pour une entrée en vigueur le 30 décembre 2018. Le Vietnam leur a emboîté le pas en janvier 2019, et les autres pays signataires (Chili, Malaisie, Pérou, Brunei) feront de même lorsque leurs parlements respectifs auront entériné l’Accord.
Une fois pleinement mis en œuvre, le PTPGP ouvrira au Canada un marché de 495 millions de consommateurs, un chiffre qui pourrait bien gonfler, la Colombie, l’Indonésie, Taïwan, la Thaïlande, la Corée du Sud et le Royaume-Uni ayant tous fait part de leur intérêt à participer à l’entente.
Afin d’aider les entreprises canadiennes à accéder aux marchés du nouvel accord, nous avons pris part à l’atelier d’Investir Ottawa animé par Christian Sivière, le dirigeant de l’entreprise montréalaise Solimpex, spécialisée en commerce et en logistique. Pour faire écho au nombre de signataires de l’Accord, il nous a donné onze précieux conseils sur l’accès au PTPGP.
1: Lisez l’Accord
Trade agreements are complicated legal documents. Sivière suggests reading the CPTPP on the New Zealand Foreign Affairs & Trade website. “It’s well laid out and easy to follow,” he says. “Maybe this is because pursuing the agreement was New Zealand’s idea to begin with.”
2: Ciblez les chapitres pertinents
L’Accord compte 30 chapitres. Le plus pertinent pour les exportateurs est le troisième, car il traite des règles d’origine, particulièrement importantes à connaître. Si vous êtes dans le secteur du textile, penchez-vous sur le chapitre 4. Vous trouverez ci-dessous un récapitulatif des chapitres qui concernent les exportateurs et les investisseurs internationaux.
- Chapitre 1 : Dispositions initiales et définitions générales
- Chapitre 2 : Traitement national et accès aux marchés pour les produits
- Chapitre 3 : Règles d’origine et procédures d’origine
- Chapitre 4 : Produits textiles et vêtements
- Chapitre 5 : Administration des douanes et facilitation des échanges commerciaux
- Chapitre 6 : Recours commerciaux
- Chapitre 7 : Mesures sanitaires et phytosanitaires
- Chapitre 8 : Obstacles techniques au commerce
3: Renseignez-vous sur les accords parallèles
Le PTPGP s’accompagne de 25 accords parallèles, et il importe de connaître ceux qui touchent le Canada. Par exemple, le gouvernement fédéral a conclu un accord parallèle avec le Japon sur les produits forestiers et un autre sur l’agriculture et les produits chimiques. Nous avons aussi des accords parallèles avec la Nouvelle-Zélande concernant l’industrie culturelle, les vins et spiritueux et les indicateurs géographiques, ainsi qu’avec l’Australie pour le bœuf, les véhicules motorisés, les produits laitiers et la transformation des aliments. En prenant connaissance de ces accords parallèles, vous saurez s’ils ont une influence sur vos activités et, le cas échéant, quels en sont les effets.
4: Cherchez à comprendre les annexes des chapitres
Il vous faudra aussi vous familiariser avec les annexes. Il y en a 59, et 33 portent sur les droits de douane, les marchandises, les tarifs douaniers et les contingents tarifaires. Quatre autres traitent des règles d’origine; onze, des visas temporaires pour les voyageurs d’affaires; et onze également, de l’approvisionnement des marchés publics. À noter qu’à la différence de l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne, le PTPGP ne prévoit pas de règle unique quant aux autorisations de séjour temporaire des gens d’affaires : chaque pays applique ses propres règlements.
5: Sachez que les droits de douane ne seront pas tous éliminés en même temps
Lorsqu’un pays met en vigueur le PTPGP, la plupart des droits de douane sont immédiatement éliminés, à quelques exceptions près. Par exemple, le Japon verra la majeure partie de ses droits de douane disparaître le 1er avril, mais pour certains produits de base, cela se fera par étapes. Pour ce qui est des pays qui n’ont pas encore mis l’Accord en vigueur, les droits de douane seront éliminés 60 jours après la prise d’effet. Par exemple, si le PTPGP prenait effet demain en Malaisie, l’élimination des droits de douane y serait effective 60 jours plus tard.
6: Trouvez les règles d’origine qui vous concernent
Comme c’est le cas avec tout accord commercial, les règles d’origine sont, pour les exportateurs, les éléments les plus importants à considérer. En deux mots, ce sont elles qui déterminent si un produit est admissible à l’exemption des droits de douane, que celui-ci soit en partie d’origine étrangère ou non. Avec les graines de soya, c’est plutôt simple : il s’agit d’un produit canadien si elles sont cultivées au Canada. En revanche, pour des produits plus complexes dont la chaîne d’approvisionnement est mondiale, les pistes peuvent être brouillées. Comment évaluer la teneur en valeur régionale d’une motoneige dont le châssis a été fabriqué au Canada; le moteur, en Autriche; les chenilles, en Finlande; le siège, en Turquie; et, pour finir, les pièces, au Mexique et au Vietnam? Si vous exportez cette motoneige, il vous faut établir la valeur des matières originaires du Canada ou de l’un des pays du PTPGP. Pour notre exemple, les pièces produites au Mexique et au Vietnam seront considérées comme provenant du Canada, car ces deux pays sont eux aussi membres de l’Accord.
Il existe également des dispositions sur les changements tarifaires. Si vous importez des feuilles d’acier des États-Unis pour les transformer ensuite en seaux d’acier décoratifs, ceux-ci peuvent être considérés comme entièrement canadiens, car vous avez fabriqué un tout nouveau produit à partir de matières premières.
Dans le cadre du PTPGP, les règles d’origine demandent à ce que la teneur en valeur régionale d’un produit se situe entre 30 et 40 %. À cet égard, le PTPGP est légèrement moins rigoureux que l’ALENA, qui, toujours en vigueur, exige habituellement une valeur de 50 à 60 %. À noter toutefois que les automobiles sont soumises à leurs propres règles, lesquelles sont établies dans l’annexe 3-D. Pour le textile, consultez l’annexe 4-A.
Après avoir déterminé si votre produit est conforme aux règles d’origine, vous devrez remplir un certificat d’origine, au moyen duquel vous attestez de l’admissibilité de votre produit au régime douanier préférentiel fixé par le PTPGP. Pour la plupart des accords, il s’agit d’un document à part entière, mais, dans le cas du PTPGP, vous pouvez utiliser n’importe quel document, comme une facture commerciale. Toutefois, M. Sivière conseille de continuer à le faire séparément.
7: Profitez des décisions anticipées
Si vous n’êtes pas certain de comprendre comment les règles d’origine s’appliquent à votre produit, que vous souhaitez vérifier son code SH dans le Système harmonisé (une norme internationale de classification des produits échangés sur les marchés), ou encore si votre produit est entièrement nouveau, vous pouvez demander au pays ciblé de se prononcer sur votre produit. Par exemple, si vous souhaitez l’exporter en Australie, vous pouvez soumettre à son autorité douanière une demande de décision anticipée au sujet des règles d’origine qui s’appliquent à votre produit. La décision est valide trois ans.
8: Vérifiez si la règle du seuil minimum s’applique à vous
Comme la plupart des accords commerciaux, le PTPGP comporte la règle du seuil minimum, selon laquelle un produit contenant un petit pourcentage de matériau étranger reste admissible au traitement tarifaire préférentiel. Aux termes de l’Accord, un produit dont la teneur en matières étrangères ne dépasse pas 10 % peut bénéficier d’un accès en franchise de douane. Encore une fois, le PTPGP est moins sévère que l’ALENA, dont le seuil minimal est fixé à 7 %. À noter toutefois que certains produits font exception à cette règle, notamment les produits laitiers.
9: Connaissez vos obligations en matière de tenue de registres
Ce sont généralement les importateurs qui ont cette responsabilité, mais dans le cadre du PTPGP, importateurs comme exportateurs doivent conserver pendant au moins cinq ans tous les dossiers faisant foi de la conformité de leurs produits aux règles d’origine du PTPGP.
10: Respectez la règle de l’expédition directe
Rarement mentionnée, cette règle douanière élémentaire est pourtant présente dans la plupart des accords commerciaux. Elle indique qu’un produit doit avoir été expédié directement du pays exportateur pour bénéficier d’un traitement douanier préférentiel. Toutefois, il existe en fait une échappatoire pour permettre à vos marchandises de transiter par un autre pays, à la condition qu’elles demeurent sous la garde des douanes en tout temps et que vous présentiez les documents douaniers qui le prouvent. On retrouve également cette règle dans l’AECG.
Bonus: Dotez-vous d’un plan
Fort de tous ces conseils, vous êtes maintenant prêt à bâtir un plan. D’abord, déterminez les marchés les plus prometteurs pour votre entreprise. Ensuite, familiarisez-vous avec les règles d’origine qui s’appliquent à votre produit, calculez les coûts d’expédition vers les pays ciblés et, pourquoi pas, songez à adapter votre produit ou à en concevoir un entièrement inédit pour tirer pleinement profit du PTPGP.