Ces cinq dernières années, la gestion de la chaîne d’approvisionnement mondiale a posé un défi croissant pour les entreprises et la pandémie de COVID-19 n’a fait qu’empirer les choses.
C’était là l’un des grands messages de Zeeshanali Fazal, gestionnaire principal de comptes pour le Groupe de la technologie d’Exportation et développement Canada (EDC), dans un récent épisode du balado Let’s Talk Supply Chain (disponible en anglais).
« Nous avons vu cela avec la volatilité politique. Nous entendons beaucoup parler des tarifs douaniers. Nous entendons de plus en plus parler des quotas et des renégociations des accords de libre-échange. Ce sont des choses qui soulèvent beaucoup de questions chez les entreprises canadiennes, et c’est pour ça que nous sommes là. »
D’autres facteurs viennent aussi complexifier la gestion de la chaîne d’approvisionnement :
- La cybersécurité : Les vols de données, les cyberattaques et les maliciels, entre autres;
- Les catastrophes naturelles : Les feux de forêt et les inondations peuvent nuire à l’accessibilité des ports;
- La COVID-19 : La pandémie a fait fermer les frontières et a grandement perturbé les chaînes d’approvisionnement du monde entier;
- Les risques financiers : Ils sont liés aussi bien aux fluctuations de change qu’à la capacité des acheteurs et des fournisseurs à payer leurs factures.
« Plus on se mondialise et on commence à faire affaire avec des acheteurs et des fournisseurs étrangers, plus les risques augmentent, » surtout lorsqu’on passe d’un pays à l’autre, ou d’un groupe de fournisseurs à l’autre, explique Zeeshanali Fazal.
Les entreprises canadiennes doivent être conscientes non seulement des risques logistiques, mais aussi de la façon dont leurs principes de responsabilité sociale s’appliquent au-delà de nos frontières.
Heureusement, les entreprises d’ici ont la réputation, sur les marchés étrangers, d’être des sources de technologies novatrices qui améliorent l’efficacité et réduisent les coûts.
« Le monde veut des solutions novatrices et de la flexibilité. Souvent, il est plus facile pour les petites et moyennes entreprises (PME) [que pour les multinationales] d’être flexibles et de se tourner rapidement vers des solutions innovantes, évolutives et attrayantes pour les clients. »
Pour la croissance des entreprises dirigées par des femmes
Une part grandissante de ces agiles PME sont dirigées par des femmes. Dans un autre récent balado en direct de Let’s Talk Supply Chain (disponible en anglais) soulignant la Journée mondiale de l’entrepreneuriat féminin, deux clientes d’EDC ont discuté des obstacles qu’elles ont dû affronter et des réussites dont elles peuvent se targuer dans leurs projets d’expansion internationale.
Laura Burget est cofondatrice de Three Ships Beauty (disponible en anglais), une gamme de produits naturels de soins de la peau. Shamira Jaffer est la directrice générale de Signifi Solutions, un fournisseur d’appareils automatisés destinés au commerce de détail. Ensemble, elles ont discuté de divers sujets, dont :
- la certification des produits et les approbations réglementaires;
- la protection de la propriété intellectuelle (PI);
- la logistique et les frais d’expédition;
- le recours aux opérations de couverture pour se protéger contre le risque de change.
Même si leurs produits n’ont à peu près rien en commun matériellement, les entrepreneures se sont heurtées aux mêmes obstacles. Un de leurs problèmes a consisté à trouver les bons partenaires de logistique pour les expéditions internationales.
« On expédiait nos produits en Europe et en Asie, mais on se retrouvait constamment avec des commandes égarées, raconte Laura Burget au sujet de son entreprise de produits de beauté. À peu près 25 % des colis se perdaient en chemin, c’était vraiment problématique. »
Shamira Jaffer ajoute pour sa part que la réparation à l’étranger d’une machine distributrice de 360 kilos endommagée pendant le transport est « un casse-tête très coûteux ».
« L’important, c’est de trouver les bons partenaires, les bonnes entreprises de logistique. On fait affaire avec un certain partenaire en Asie et avec un autre en Europe, parce que les entreprises de logistique ont souvent chacune leur spécialité. Il faut travailler un peu pour dénicher le bon partenaire. »
Des premières étapes simples mais efficaces
Les deux entrepreneures tenaient à déboulonner le mythe selon lequel la croissance internationale d’une entreprise détenue et dirigée par une femme serait un défi herculéen.
« Ce n’est pas si effrayant que ça, explique Shamira Jaffer : les produits canadiens, tout le monde en veut. Il y a des millions de personnes qui voient les choses dans l’autre sens et qui se disent : “Si seulement je pouvais mettre la main sur tel produit canadien.” Le Canada a une excellente réputation. »
Et il n’est pas nécessaire de tout prévoir dans les moindres détails avant de commencer, selon l’entrepreneure. « Fixez-vous un but et lancez-vous. Vous trouverez les solutions en cours de route. »
Laura Burget conseille vivement aux aspirants exportateurs de faire d’abord quelques appels pour vérifier s’il y a un marché pour leurs produits dans le pays en question.
« Vous pourriez croire que votre produit se vendra bien sur un marché donné pour finalement découvrir qu’une entreprise occupe déjà 90 % de ce marché ou que celui-ci est contrôlé par l’État. Si votre chiffre d’affaires se situe entre 100 000 et 3 millions de dollars et que vous croyez pouvoir conquérir un autre marché, prenez contact avec un acheteur potentiel et essayez d’organiser un appel pour lui poser des questions. »
Laura Burget suggère de procéder de la même manière pour trouver des experts (banquiers, avocats spécialisés en propriété intellectuelle et spécialistes de la réglementation, notamment) prêts à travailler avec vous.
« Pas besoin de les embaucher et de faire une analyse détaillée. Commencez simplement par un appel de 30 minutes. » Bien des professionnels offrent une première consultation gratuite, ajoute-t-elle.
Une fois vos recherches effectuées, il est temps de préparer un plan stratégique robuste qui tienne compte des défis potentiels et des risques de marché, suggère Jennifer Cooke, directrice du commerce inclusif et responsable de la stratégie pour les femmes en commerce.
« Réfléchissez aux outils à votre disposition et aux façons d’en tirer avantage. Protégez votre propriété intellectuelle, protégez-vous contre les défauts de paiement; vous pouvez prévoir et atténuer tous ces risques en préparant votre expansion internationale. De quelles ressources – financières et humaines – aurez-vous besoin pour réussir? EDC est là pour vous, où que vous en soyez dans votre parcours. »
L’exportation pour accélérer la croissance
Shamira Jaffer et Laura Burget affirment toutes deux que c’est grâce à l’exportation que leurs entreprises respectives sont passées à la vitesse supérieure sur le plan des ventes et de l’innovation. La première admet que le marché canadien n’est pas suffisamment vaste pour des produits comme les siens, et que les acheteurs canadiens sont généralement plus prudents que ceux d’ailleurs. C’est d’ailleurs une vente à Dubaï qui a stimulé la croissance initiale de Signifi.
« [À Dubaï,] ça innove et ça bouge vite. Ça nous a poussés à en faire plus que pour un client ordinaire. Nous avions une longueur d’avance grâce à l’exportation. Le Canada ne représente plus que 10 à 15 % de notre chiffre d’affaires. »
Par ailleurs, Laura Burget estime que la présence de ses produits chez les détaillants un peu partout aux États-Unis (É.-U.) a été un facteur important pour l’obtention de financement.
« Les grands fonds de capital-risque et les sociétés mères qui cherchent à acquérir de plus petites entreprises sont installés aux É.-U. Ils accordent de l’importance à la présence sur ce marché. »
Jennifer Cooke ajoute que la pandémie a mis en évidence la nécessité de se diversifier pour atténuer naturellement le risque. « Vous devez vous assurer d’avoir d’autres possibilités, autant de fournisseurs que de clientèle, sur des marchés différents. »
EDC prête main-forte aux entrepreneures
Lorsque Three Ships Beauty a eu à remplir l’une de ses premières commandes majeures pour un détaillant américain, l’Assurance crédit d’EDC a procuré tranquillité d’esprit à Laura Burget.
« Nous avions un gros contrat de 250 000 $ qui nous inquiétait beaucoup. Si on ne nous payait pas, c’était la fin de l’entreprise. »
Les programmes d’EDC ont aussi permis à Shamira Jaffer d’obtenir le fonds de roulement dont Signifi avait besoin pour exécuter des commandes de plusieurs millions de dollars pour des clients à l’étranger et ainsi faire grandir l’entreprise rapidement.
« Sans prêt, on peut s’en sortir à force de détermination, mais la route sera bien plus longue. »
Les entreprises dirigées par des femmes ont également besoin d’investisseurs en capitaux propres. Au vu des défis que doivent surmonter les entrepreneures pour mobiliser des capitaux, EDC a lancé en 2019 le Programme d’investissement pour les femmes en commerce, de 50 millions de dollars, pour les entreprises en expansion qui sont détenues ou dirigées par des femmes. Au début de 2020, EDC a doublé l’enveloppe du programme, qui est passée à 100 millions de dollars.
« Le programme a permis à EDC d’investir dans des entreprises canadiennes détenues ou fondées par des femmes plus tôt dans leur progression qu’à la normale, explique Jennifer Cooke. Nous avons jusqu’ici versé 43 des 100 millions de dollars du fonds, et nous maintenons le cap pour aider d’autres entreprises de la sorte. »